Couleur Café J2: Bad Gyal, une autre vision du reggaeton
Sur la scène principale de Couleur Café, la superstar espagnole fait valser l’image ultramachiste du style musical le plus populaire au monde, le reggaeton.
A l’évocation du reggaeton, difficile de ne pas s’entendre fredonner les refrains des “Despacito” ou “Gasolina” de la star portoricaine Daddy Yankee. Difficile, aussi, de ne pas s’imaginer des torses transpirants, des palmiers, des filles en maillot de bain à côté de la piscine ou de ne pas l’associer à des paroles misogynes et sexistes ou des comportements machistes adoptés dans les clips.
Depuis quelques années, quelques figures latines tentent de déconstruire ces stéréotypes bien implantés, Bad Bunny en tête. En prenant la défense des personnes transgenres, en évoquant sa fluidité de genres ou en s’habillant en drag, le chanteur le plus écouté dans le monde parvient à bousculer les idées reçues à grande échelle. Parmi ces agitateurs, et d’une toute autre manière, on retrouve également Bad Gyal, artiste d’origine catalane.
Encore peu connue chez nous, elle s’impose comme une superstar dans le monde de la musique latine. Pas étonnant, dès lors, de la retrouver sur la mainstage de Couleur Café, ce samedi soir. La foule, elle, se montre plutôt clairsemée. Dans le public, on retrouve notamment des fans hispanophones venus spécialement pour elle, on les entendait reprendre à tue-tête ses tubes plus tôt dans l’après-midi, et quelques curieux venus découvrir le phénomène et s’essayer au twerk. Les autres potentiels adhérents sont sans doute partis se réfugier sous le chapiteau de la Fox Stage pour éviter la bonne petite drache habituelle.
Avec Bad Gyal, Couleur Café n’a pas misé sur une tête d’affiche consensuelle et fédératrice.
Lunettes fumées, micro recouvert de diams, mini-jupe à sequins, bottes noires chevelues, logo doré scintillant avec des flammes en arrière-plan sur l’écran, l’Espagnole s’inspire d’une esthétique Y2K, qui surfe volontairement avec le mauvais goût. C’est flashy, clinquant, voire un peu vulgaire.
Alba Farelo Solé, de son vrai nom, interprète ici un personnage. Celle-ci se glisse dans la peau d’une femme qui n’a peur de rien et qui prend le contrôle. Comme ses collègues féminines, Karol G, Anitta, Becky G ou Young Miko, Bad Gyal veut reprendre sa place dans un genre musical traditionnellement dominé par les hommes. Elle aussi veut pouvoir parler de fric, de bagnole, de sexe.
Sur scène, la compositrice s’entoure de deux danseuses et deux danseurs pour présenter un show gentiment provocant et sensuel. Oui, il y a beaucoup de booty shake et de mouvements de bassins suggestifs. La Catalane de 27 ans ne réinvente pas les codes du reggaeton. Via certaines thématiques ou la danse (le perreo), elle cherche plutôt à se les réapproprier. Pour elle, la sexualité doit se voir comme un outil d’émancipation.
En plus de quelques extraits de son dernier album, La Joia, Bad Gyal déroule un impressionnant catalogue de featurings : “Chulo Pt.2”, “Guay”, “Double Team”,”KÁRMIKA”, “Tú eres un bom bom”… Pas simple de trouver comment combler les couplets de ses compères : un baiser ici, un déhanché par là. Mais la formule se voit et s’use vite. Côté chant, la révélation latine assure, aidée par un bon autotune et des backing tracks, comme c’est le cas pour la plupart des grandes stars de la pop. Malgré quelques longueurs, Bad Gyal parvient à embarquer avec ses sonorités reggaeton irrésistibles. Un show qui fait du bien. Et c’est tout ce qu’on demande.
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