Treize ans après sa disparition brutale, DJ Mehdi a droit à un docu incontournable

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Laurent Hoebrechts
Laurent Hoebrechts Journaliste musique

Treize ans après son décès accidentel, DJ Mehdi a droit à un passionnant documentaire en six épisodes, diffusé dès ce 12 septembre sur Arte.tv. L’occasion de revenir, avec son réalisateur Thibaut de Longeville, sur le parcours unique d’un artiste solaire et rassembleur, bâtisseur de ponts entre rap et électronique.

Certaines disparitions pèsent plus que d’autres. Le 13 septembre 2011, la verrière sur laquelle se trouvait DJ Mehdi s’effondrait, l’entraînant dans une chute mortelle. Il avait à peine 34 ans. Dès l’annonce du drame, les réactions de stupéfaction se multiplieront, un peu partout dans le monde, de Soulwax à Pharrell Williams, en passant par Katy Perry ou Drake. La preuve que, même tapi dans l’ombre comme le sont habituellement les DJ-producteurs, le Français a marqué les esprits.

Treize ans plus tard, le paysage musical a considérablement changé. Mais l’ombre de DJ Mehdi plane toujours. Pas besoin d’aller chercher très loin. Sa musique est encore présente partout. De la cérémonie d’ouverture des J.O. de Paris (ou de clôture des Paralympiques) à l’émission télé de débat C Ce Soir, sur France 5 (qui utilise la version orchestrale de Pocket Piano, comme générique).

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Au lendemain de la date anniversaire de son décès, DJ Mehdi aura également droit cette année à une journée-soirée hommage à la Gaîté Lyrique, à Paris. La célébration accompagne le lancement d’une série documentaire consacrée au musicien. Primé lors du dernier festival Canneseries, DJ Mehdi: Made in France sera diffusé sur Arte.tv, dès ce jeudi 12 septembre. Découpé en six épisodes d’une quarantaine de minutes chacun, le documentaire est un vrai must-see. Pas besoin d’être fan de DJ Mehdi. À l’instar du docu d’Orelsan (le carton de Montre jamais ça à personne), il est susceptible de plaire bien au-delà du cercle des convaincus. Grâce notamment à son montage au cordeau et à ses images d’archives inédites, s’appuyant aussi bien sur les témoignages de la famille que ceux des collègues-amis de cet acrobate des platines.

DJ Mehdi, entre deux mondes

Aux manettes du docu, on trouve Thibaut de Longeville. Réalisateur, il est tombé dans la marmite hip-hop dès l’adolescence. Jeune journaliste, il a écrit sur les premiers disques de rap français, avant de mettre les mains dans le cambouis en tant que stratège, créatif, directeur de label, puis de se concentrer davantage sur la réalisation de documentaires.

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Celui consacré à DJ Mehdi lui trottait en tête depuis un moment. « Avec Mehdi, on était très proches. On se connaissait depuis le lycée. Quelque part, dès le lendemain de ses funérailles, je savais que j’allais monter un film pour raconter son parcours.«  En s’imaginant que le projet allait prendre autant de temps? « Il y a deux raisons pour expliquer que le film ait mis si longtemps à se concrétiser. D’abord, la famille était très éprouvée. Elle n’était pas prête à parler et à participer au film. J’ai voulu respecter son deuil, sa tristesse. J’ai donc attendu très sagement qu’ils reviennent vers moi. En sachant aussi que plus le temps avançait, plus ce genre d’hommage posthume devenait difficile à monter… »

De fait, quand la famille finit par donner son accord, Thibaut de Longeville fait le tour des plateformes. Et galère. « Tous étaient emballés par le projet. Mais à la fin, c’était toujours non. L’objectif de ces diffuseurs est de s’assurer que les programmes qu’ils achètent soient susceptibles de doper le nombre de leurs abonnés. Or, même si l’audience de DJ Mehdi était internationale, ce n’était pas non plus Johnny Hallyday… »

Jusqu’au bout du sample

Thibaut de Longeville a fini par trouver refuge chez Arte. Entre-temps, il aura eu le temps de peaufiner et nourrir son projet. Notamment en partant à la pêche aux archives, à propos d’une musique -le rap- et une période en particulier -les années 2000- chichement documentées, snobées même par la plupart des médias.

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À côté de ces images souvent inédites (le concert historique du groupe Ideal J à l’Élysée Montmartre en 1999), Thibaut de Longeville a également pris soin de trouver le juste équilibre entre le récit humain -les nombreux témoignages, souvent drôles et touchants- et artistique. Régulièrement, le documentaire prend ainsi le temps de déconstruire tel ou tel sample. « Certains n’étaient pas chauds. On me disait que ça ne servait à rien de mettre des tutos YouTube dans le film. Mais j’étais convaincu qu’il y avait moyen de rendre ça passionnant. Par exemple en s’inspirant de ce que l’on peut voir dans des émissions comme Top Chef ou la série The Bear. En filmant d’une certaine manière, l’épluchage d’un oignon ou la découpe d’une carotte peut se transformer en un véritable thriller. De la même manière, j’étais certain que montrer comment avait été construit tel morceau pouvait être aussi palpitant qu’une scène de braquage. »
De fait, le récit n’en est que plus intéressant et captivant.

Prince de la ville

Il retrace le parcours de Mehdi Faveris-Essadi, né en 1978 à Paris, fils d’un père français et d’une mère noire tunisienne. Un passionné de musiques, qui bidouille son premier sampler quand il a à peine 13 ans. Et rejoint son premier groupe, Ideal J, quand il en a 14 (se liant d’amitié avec Kery James, à peine plus âgé que lui). Il y a ensuite l’aventure de la Mafia K’1 Fry, collectif tentaculaire qu’il abreuve de ses productions. Le troisième épisode de la série est entièrement consacré au 113 et à l’album Les Princes de la ville.

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Pas difficile de comprendre pourquoi. Disque révolutionnaire pour le rap français, il va aussi servir de bascule pour DJ Mehdi, qui va ouvrir de plus en plus son univers musical. Jusqu’à plonger à corps perdu dans la musique électronique, vivant de l’intérieur l’explosion de la French Touch -Daft Punk, Cassius, et consorts. Figure solaire, Mehdi va ainsi faire le lien entre les deux mouvements musicaux majeurs. Quitte, comme le montre très bien la série, à parfois semer le trouble, chez les uns comme chez les autres. « Avec la disparition de Mehdi, j’ai évidemment perdu mon pote. Quelqu’un dont j’étais fan de la musique. Mais au-delà de mon prisme personnel, je pense vraiment que l’histoire de Mehdi est pleine d’enseignements. Qu’elle raconte quelque chose qui est presque d’utilité publique. Notamment par la manière dont il a rassemblé deux mondes. Et réussi à faire le lien entre les deux courant musicaux les plus populaires de ces 40 dernières années en France! »

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