
De DJ Koze à Bon Iver, passant par la soul d’Annie and the Caldwells, les aventures sonores de Backxwash ou la nouvelle réinvention de Black Country, New Road: on fait le point sur les meilleurs disques du moment.
1. Bon Iver – SABLE, fABLE
A l’étroit dans son costume de superstar indie-folk torturée, Bon Iver retrouve sur son cinquième album la lumière et une certaine forme de simplicité. (…) Dès Short Story, et surtout Everything Is Peaceful Love –et sa steel guitar glissant sur une boîte à rythmes vintage–, Bon Iver s’éloigne en effet de ses humeurs les plus bileuses. Sa musique y gagne en clarté et en simplicité.
Lire aussi | Notre critique complète
Fini les expérimentations électroniques et le travail complexe sur les textures. Sur SABLE, fABLE, le falsetto reconnaissable entre mille de Justin Vernon cherche davantage l’apaisement, sonnant plus sexy que tourmenté. Un morceau comme I’ll Be There, par exemple, renvoie moins à une complainte à la Nick Drake qu’à un titre soul/jazzy de Prince période New Power Generation. Juste avant, From est lui ce qui se rapproche sans doute le plus du son rock FM, avec sa mélodie prête pour prendre l’autoroute.
Vous pouvez modifier vos choix à tout moment en cliquant sur « Paramètres des cookies » en bas du site.
Pas question de se renier complètement. De la musique de Bon Iver transpire toujours une humanité touchante qui l’empêche de tomber dans la posture triomphale. Tenant à distance le personnage de songwriter torturé qui a fini par lui peser, il réussit cependant à lâcher du lest, se rapprochant toujours plus de ce qui ressemble bien à une certaine forme de sérénité. ● L.H.
Distribué par Jagjaguwar
La cote de Focus : 4/5
2. DJ Koze – Music Can Hear Us
On le savait déjà : l’eau a une mémoire, et les arbres discutent entre eux. Mais étiez-vous au courant que la musique était également capable de vous entendre ? C’est du moins l’hypothèse du dernier album de DJ Koze, esprit curieux et azimuté de la musique électronique allemande. Un drôle de coco, Stefan Kozalla de son vrai nom, quinqua passé par le rap (le groupe Fischmob), tombé dans la techno minimale (son passage par Kompakt), avant d’imaginer une sorte d’électronica à la fois œcuménique et déviante, chaleureuse et adepte de l’absurde.
Sept ans après l’épatant Knock Knock (succédant lui-même au non moins fabuleux Amygdala), son nouveau Music Can Hear Us démarre par les mots du mystique persan du XIIIe siècle, Rûmî : « Au-delà de la notion du bien et du mal, il y a tout un territoire : c’est là que je vous attend ». Vaste programme s’il en est. Il pourrait même paraître lunaire dans une époque particulièrement polarisée et tiraillée. Mais justement, pourquoi ne pas tenter le coup ?
Vous pouvez modifier vos choix à tout moment en cliquant sur « Paramètres des cookies » en bas du site.
Sur Pure Love, Damon Albarn chante à moitié hilare sur un groove afrobeats amniotique, tandis que Wie schön du bist imagine une version teutonne et émerveillée de la soul music. A chercher l’épure, le cœur coulant du disque est à fleur de peau – Unbelievable, où la chanteuse Ada fait le lien entre ambient et cabaret brechtien, ou encore la version chloroformée du tube eighties Vamos a la playa, avec Soap & Skin. Avant de laisser le mot de la fin à l’ensemble vocal féminin japonais Marevrew (Umaoi), DJ Koze échauffe encore les BPM – le breakbeat de Brushcutter ou la techno tropicale de Buschtaxi. Mais sans jamais briser le fil d’un album sensible et surprenant, drôle et émouvant.
Ecouter Music Can Hear Us revient ainsi à vous retrouver dans le même état de félicité ridicule que celui que vous pouvez atteindre en faisant la planche au milieu de l’océan : à la fois immobile et bercé par les vagues, en contrôle et complètement serein, à moitié immergé, à moitié à l’air libre. C’est là que DJ Koze vous attend…
Distribué par Pampa
La cote de Focus : 4,5/5
3. Backxwash – Only Dust Remains
A l’affiche du BRDCST, le plus barré, exigeant et intéressant festival bruxellois, dont elle était cette année l’une des curatrices, Backxwash est le nom de scène d’Ashanti Mutinta. Cette rappeuse trans d’origine zambienne se promène entre Montréal et Ottawa avec un mélange d’horrorcore, de rock lourd, de musiques industrielles et de hip-hop expérimental, autant nourrie par la musique de Black Sabbath que par les sonorités africaines et les films d’horreur. Cinglée? Sur son troisième EP intitulé Stigmata, Backxwash échantillonnait des morceaux de métal chrétien pour créer ses trames musicales…
Vous pouvez modifier vos choix à tout moment en cliquant sur « Paramètres des cookies » en bas du site.
Moins agressif et suffocant que ses prédécesseurs, Only Dust Remains, son nouvel album, l’amène sur d’autres territoires avec ses chœurs gospel et ses textures postrock, ses touches soul et son sample d’Anna von Hausswolff. Backxwash explore la santé mentale et la foi, les tragédies personnelles et les injustices mondiales. Bluffant et touchant. ● J.B.
Distribué par Ugly Hag Records.
La cote de Focus : 4/5
4. Annie and the Caldwells – Can’t Lose My (Soul)
Toujours prêt à déterrer des trésors cachés et à sortir des génies de l’anonymat (ça va de William Onyeabor à Tim Maia), Luaka Bop, le label fondé en 1988 par David Byrne, a à nouveau réussi une jolie pioche avec Annie and the Caldwells. Chez Annie, qui avait 11 ans lorsqu’elle montait avec ses frères les Staples Jr. Singers en hommage au groupe soul gospel de Chicago, la musique est une affaire de famille.
Vous pouvez modifier vos choix à tout moment en cliquant sur « Paramètres des cookies » en bas du site.
Après avoir épousé le guitariste Billie Joe Caldwell et ouvert un magasin de mode pour femmes pieuses, Annie a créé un groupe de gospel pour détourner ses enfants du blues (une musique profane). Non sans s’inspirer de Bootsy Collins et Chaka Khan. Après 40 ans d’existence, Annie a enfin enregistré, avec ses filles Deborah et Anjessica, son fils aîné Willie Jr. (basse), son fils cadet Abel Aquirius (batterie) et sa filleule Toni Rivers, le premier album d’Annie and the Caldwells. Un petit bijou produit par Sinkane. ● J.B.
Distribué par Luaka Bop
La cote de Focus : 4/5
5. Black Country, New Road – Forever Howlong
Que ce soit ou non par la force des choses, Black Country, New Road se réinvente à chacun de ses albums. Après l’accidenté et radical For the First Time (2021) et le disque de songwriter indie Ants from Up There (2022) porté par le chant d’Isaac Wood à ranger aux côtés d’Arcade Fire, de Neutral Milk Hotel, Sufjan Stevens et Bright Eyes (il y a aussi eu depuis un live de transition), le sextet anglais signe un troisième album studio à trois voix, féminines celles-là, qui dégage encore un peu plus ses horizons. Savamment arrangé, porté par son souffle et sa grandeur orchestrale, Forever Howlong joue avec les fantômes folk des années 1970, évoque tour à tour Kate Bush et Joanna Newsom et tutoie les aventuriers de la pop de chambre. ● J.B.
Vous pouvez modifier vos choix à tout moment en cliquant sur « Paramètres des cookies » en bas du site.
Distribué par Ninja Tune/Pias. Le 28/10, à l’Ancienne Belgique (Bruxelles)
La cote de Focus : 3,5/5
Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici