Childish Gambino, Jack White, Rema: que penser de leurs nouveaux albums?
L’été n’est pas avare en sorties musicales de choix. Nous avons écouté les nouveaux albums de Childish Gambino, Jack White et Rema.
Childish Gambino – Bando Stone & The New World ****
POP Distribué par Sony. Le 23/11 au Palais 12 (Bruxelles).
Il faut pouvoir suivre Donald Glover. Vorace et hyperactif, il est à la fois acteur-producteur-réalisateur-scénariste, concepteur notamment de la série multiprimée Atlanta. Sous le nom de Childish Gambino, il est également chanteur-rappeur-compositeur, ayant à son compte jusqu’ici quatre albums. Des disques qui partent eux aussi dans plusieurs directions différentes. À l’instar de This Is America, probablement son single le plus connu de ce côté-ci de l’Atlantique: un drôle de tube qui commence avec un chœur joyeux pour virer au morceau trap menaçant.
Il revient aujourd’hui avec un long métrage: Bando Stone & The New World, un film d’horreur/sci-fi survivaliste post-apocalyptique, si l’on en croit les teasers. Mais aussi un album, conçu comme la bande originale du film en question. Ainsi qu’une tournée mondiale pour l’accompagner -à Bruxelles, au Palais 12. Par ailleurs, Glover a précisé que le disque serait son dernier, du moins sous le nom de Childish Gambino. Autant dire qu’il en a profité pour y fourrer toutes ses obsessions musicales, aussi disparates soient-elles. L’intéressé a toujours zigzagué entre les genres, quitte à brouiller les pistes. C’est plus que jamais le cas ici. À condition de s’accrocher un peu, le trip en vaut cependant largement la peine. Lithonia, par exemple, est une ballade rock héroïque aux accents grunge, tandis que l’étouffant Got to Be sample astucieusement le Breathe des Anglais de The Prodigy. Accompagné de Jorja Smith et d’Amaarae, Glover délivre une sorte de r’n’b décalé avec In the Night. Ailleurs, il embarque dans une rêverie soul acoustique à fleur de peau sur Steps Beach. Ou donne des couleurs afro aux 7 minutes languides de No Excuses. De quoi donner le tournis. Et du grain à moudre aux sceptiques qui ne voient en lui qu’un habile faiseur? L’éclectisme de Glover n’est pourtant jamais creux, multipliant les idées de production. Dans un dialogue du film, repris dans l’album, une voix féminine demande: « Sais-tu pêcher? allumer un feu? chasser? ». « Non, répond Glover, mais je sais chanter. » « Alors tu es inutile! » Pas si sûr… – L.H.
Rema – Heis ****
AFRO Distribué par Universal.
Il a suffi d’un tube planétaire pour hisser Rema au sommet de l’afrobeats. Avec Calm Down et son remix, sortis en 2022, le Nigérian a trouvé le chemin des hit-parades non seulement chez lui, au Nigeria, mais aussi à peu près partout -n°1 en Belgique, n°3 dans le Billboard US, etc. Dans la foulée, il s’était même lancé à l’époque dans une grande tournée mondiale. Dont un arrêt à Liège, aux Ardentes, en 2023, qui avait prouvé que Rema n’était pas que l’homme d’un seul morceau. Sans bouder les rondeurs du titre en question, il avait montré qu’il était capable d’allumer la mèche d’un show pétaradant.
C’est plus que jamais le cas sur son nouvel album, Heis. Influencé par la culture de Benin, la capitale de l’État d’Edo, dont est originaire Rema, l’album est bourré de percussions foisonnantes, qui laissent rarement le temps de respirer. À certains égards, Heis cultive même un côté étouffant. C’est qu’avec le succès, Rema a eu droit aussi à son lot de haters. Le jeune chanteur, né en 2000, leur répond en alignant les morceaux fiévreux, particulièrement affûtés et offensifs. Dès l’entame, March Am rugit et sonne la charge, cavalant sous les claviers et les tambours. Sur Hehehe, Rema se fait même sardonique, la voix moqueuse sur le riff de synthé tournant en boucle. En fait, il faut attendre le titre Yayo, au tiers de l’album, pour entendre le Nigérian ralentir un peu le tempo et retrouver la chaloupe de son hit initial. Ou encore Now I Know, en toute fin, pour le voir baisser enfin la garde. – L.H.
Jack White – No Name ***(*)
ROCK Distribué par Sony.
Génial entrepreneur et businessman artisan du rock’n’roll, Jack White n’a jamais cessé de réinventer les codes de la musique et de sa distribution depuis qu’il a pris le monde d’assaut au début du siècle avec ses White Stripes. Le guitar hero a créé son label (Third Man Records), ouvert des magasins de disques (à Detroit, Nashville et Londres), lancé sur les routes un Rolling Record Store, aménagé une salle, un studio et une usine de pressage. Prêt à tout pour remettre le vinyle à l’honneur, il a même envoyé une platine en orbite dans l’espace. White est récemment parti dans l’une de ses boutiques distribuer personnellement 200 exemplaires de son nouvel album à ses fans avant sa sortie officielle. Un coup de pub assorti d’une fuite et d’une publication digitale anticipée (pour le physique, il faudra attendre la fin septembre). No Name est du Jack White pur jus. Un disque de rock électrisant, nerveux et furieux, même s’il lui manque l’une ou l’autre chanson qui colle à l’oreille. Jack wild… – J.B.
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