Blurred Lines de Robin Thicke, incitation au viol?
Depuis sa sortie, le clip Blurred Lines fait beaucoup parler de lui. Si sa mélodie trotte dans la tête de nombreux fans, le morceau de Robin Thicke se trouve au coeur d’une polémique.
Accusé de glorifier le viol, le clip a été retiré de YouTube. Seule sa version censurée peut encore être consultée sur le site d’hébergement de vidéos. Trois mannequins, Emily Ratajkowski, Jessi M’Bengue et Elle Evans se dandinent les seins à l’air en chaussures et en culotte. Tout de noir vêtu, Robin Thicke leur murmure des paroles à l’oreille: « I know you want it », « You are a good girl ». La chanson évoque une jeune fille qui rêve d’une nuit de sexe torride sans oser le dire. Pharrell Williams et T.I. sont également de la partie, profitant pleinement du spectacle. « Talk about getting blasted, I hate these blurred lines, I know you want it, but you’re a good girl, the way you grab me, must want to get nasty », poursuit le chanteur tandis que les trois jeunes filles continuent de se trémousser en musique.
Dès sa sortie, les critiques ont fusé de tous les côtés. C’est l’Américaine Lisa Huynh qui est la première à réagir. Sur son blog Feminist in LA,elle n’est pas tendre avec Robin Thicke. « Sérieusement, cette chanson est dégoûtante même si elle est, il faut le reconnaître, très entraînante« , écrivait-elle le 2 avril dernier. Pour la blogueuse, l’attitude du chanteur exclut la notion de consentement. Lisa Huynh publie d’autres avis critiques, glanés sur le net. « 99% de seins, 1% de musique » ou encore « la musique dans ce porno est à chier ».
Au Québec, la mannequin et actrice Aimee Davison critique ouvertement le clip dans une vidéo. Ce qu’elle regrette, ce n’est pas la nudité, mais la différence de pouvoir entre les deux sexes. Si les trois femmes sont dénudées, Robin Thicke, Pharrell Williams et T.I. portent tous trois des costumes. Aucun ne s’exhibe à l’écran. Aimee Davison déplore également l’image de femme-objet que véhicule le clip. « Les femmes n’ont aucun statut et attendent juste d’être exploitées. »
Sur le site The Independant, Katie Russel, porte-parole du Rape Crisis, une organisation anglaise destinée à sensibiliser la population sur les questions de violences sexuelles, explique que les paroles de Blurred Lines semblent glorifier la violence contre les femmes. D’une certaine manière, elle estime que la chanson tend à renforcer le mythe du viol. « Les paroles ainsi que la vidéo dégradent les femmes en utilisant un langage misogyne et une imagerie que beaucoup de monde considèreraient non seulement désagréable mais aussi dépassée. » La porte-parole dénonce la violence sexuelle de certaines paroles, qui véhiculent une image erronée de la femme. « Comme par exemple celle des femmes qui enverraient des « signaux cachés » par leurs vêtements ou leur comportement, diraient « non » alors qu’elles pensent le contraire. »
Robin Thicke, quant à lui, s’est justifié en expliquant: « Les gens disent: « Hé, estimez-vous que cela est dégradant pour les femmes? » Je réponds un truc du genre: bien sûr que ça l’est. C’est un plaisir de dégrader une femme. Je n’avais jamais appris à le faire avant. J’ai toujours respecté les femmes. »
Considéré par beaucoup comme choquant, le morceau et le clip ont pourtant fait un carton. En France, il est d’ailleurs classé numéro 1 des ventes de singles. Sur le site anglais The Vagenda, J.H. avoue avoir d’abord été séduite par la chanson. Elle se rattrape très vite, en relevant ce qui la dérange. Dans le clip, Robin porte des lunettes de soleil. Alors qu’il peut regarder sans problème les trois jeunes filles, elles ne voient que leurs reflets dans ses verres teintés. À sens unique. J.H. déplore l’attitude machiste du chanteur, qui recrache la fumée dans le visage de Elle Evans quand celle-ci lui allume langoureusement sa cigarette. « Le plus triste est que Thicke et Pharrell doivent penser que cette vidéo rend les femmes plus puissantes. Et les femmes dans la vidéo se sentent probablement cool et rebelles. » Lorsque Robin Thicke chante « Can’t be domesticated », elle ne peut que relever la triste ironie qui se cache derrière ses paroles. « Toute la vidéo parle de la domestication. Il ne s’agit pas de filles exhibant leurs corps pour leur plaisir mais pour celui de Thicke. »
Pour la femme du chanteur, le corps humain est magnifique. « Je pense que c’est honteux de considérer la nudité et le corps humain comme des offenses alors que la violence est chaque jour montrée aux enfants sans que cela ne pose problème. »
Si le clip a hérissé de nombreuses femmes, toutes ne sont pas du même avis. Dans une interview accordée au Daily Beast, Frannie Kelley, journaliste à la radio NPR Music s’amuse de l’ampleur que prend la controverse. Elle se sent davantage agressée par les personnes qui voudraient lui faire croire que le clip pose problème que par la chanson en elle-même.
Sur le site américain The Daily Beast, Maura Johnston, la fondatrice du Maura Magazine admet que les paroles de Blurred Lines sont problématiques. Mais pas forcément plus que d’autres chansons, comme Pussy, de The Dream, pour ne citer qu’un exemple. Elle estime qu’au bout du compte, il ne s’agit que d’une démarche purement commerciale.
LC (stagiaire)
La version non censurée
Robin Thicke – Blurred Lines (uncensured) par Crevette_x
La version censurée
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