Bien préparer son hiver nucléaire grâce au meilleur de la culture apocalyptique
La guerre nucléaire, ça fait depuis maintenant un mois fort peur sur Twitter et dans la bouche de Vladimir Poutine mais ça produit aussi, depuis des décennies, une culture souvent très appréciable. Ce Crash Test S07E27 vous présente ses coups de coeur du genre. Romance hollywoodienne et humour noir punk au menu, garanti 100% sans Mad Max et Furiosa!
UNE CHANSON
« Made in Italy » bien que chantée en espagnol, Vamos a La Playa de Righeira est encore aujourd’hui une scie eighties présente sur bon nombre de playlists de mariages et de radios commerciales nostalgiques. Le truc, c’est que ce n’est pas une chanson de vacances insouciantes. Traduites, les paroles donnent en effet à peu près ceci: « Allons à la plage, oh, oh, oh, oh, oh, allons à la plage, oh, oh, oh, oh, oh, allons à la plage, oh, oh, oh, oh, oh, allons à la plage, oh oh oh oh. La bombe a explosé. Les radiations brûlent. Les gens se teintent de bleu. » Il est aussi question de « mer vidée de ses poissons malodorants » et « d’eau fluorescente« . Produite en 1983 par les frères La Bionda, papes de l’italo-disco le plus tapageur, la version tubesque a beau être entraînante et efficace, son texte n’en est donc pas moins cynique, trempé d’humour très noir et assez typique de cette pop-music hantée par la terreur nucléaire qui se produisait à la tonne durant le premier mandat de Ronald Reagan. J’écris « version tubesque » parce que Vamos a La Playa est en effet une nouvelle mouture, cette fois taillée pour les dancefloors populaires et les sonos de campings, d’un titre beaucoup plus obscur originellement composé en 1981 par Stefano Righi, alias Johnson Righeira, et resté à l’époque à l’état de démo. Cette première version s’écoute depuis sur des compiles cold wave (et forcément YouTube!) et là, on est beaucoup plus proches d’OMD, de Soft Cell et de Kraftwerk. Bref, au tube de l’été, préférez la version de l’hiver nucléaire!
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UN FILM
On The Beach, réalisé par Stanley Kramer en 1959, est peut-être bien le film de guerre nucléaire le plus « doom & gloom » que je connaisse. On n’y voit pourtant pas d’atrocités, ni même beaucoup de destructions et aucun combat. Il n’y a pas non plus vraiment de suspense ni de lutte acharnée pour le dernier rouleau de PQ. Pas mal axé sur la romance très « comme il faut » entre un capitaine aux pantalons toujours bien repassés malgré la mort de 90% de l’Humanité (Gregory Peck!) et une très belle femme désespérée mais toujours digne (Ava Gardner!), on reste même drôlement plus proche du grand film d’amour hollywoodien que de Mad Max. Sauf que presque tout le monde y est continuellement bourré (ça se passe majoritairement en Australie, cela dit) et que – ATTENTION SPOILERS – tout le monde meurt aussi à la fin. Mais alors vraiment tout le monde. Suicides, effondrement de la société, tentative vouée à l’échec d’échapper aux radiations… Noir, c’est noir et il n’y a plus d’espoir. Ce qui tient de la pure couillonnade, selon un spécialiste de la guerre nucléaire du nom de Cresson Kearney, qui critiqua le roman à la base du film (On The Beach par Nevil Shute, 1957) en le traitant de « pseudo-science démoralisante« . Selon ce joyeux luron, on peut en effet parfaitement survivre à un conflit nucléaire, y compris sur les lieux d’une explosion. Le tout est d’appliquer à la lettre quelques méthodes de scout NBC et de connaître une série de petits trucs à la McGyver. Son principal bouquin sur le sujet s’appelle Nuclear War Survival Skills et coûte aujourd’hui un peu plus de 3 balles sous le format Kindle. Merci qui?
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UNE BD
Au « doom & gloomomètre », la bande dessinée The Last American est elle aussi bien dans le rouge. Elle date du tout début des années 1990 et est l’oeuvre de trois sujets de Sa Gracieuse Majesté: les scénaristes John Wagner et Alan Grant, ainsi que le dessinateur Mike McMahon. Le trio vient de l’univers 2000 AD, ce magazine de science-fiction anglais surtout connu pour être le berceau du personnage Judge Dredd. La mini-série The Last American, en 4 épisodes, fut par contre produite aux États-Unis, pour la maison Epic, filiale adulte de la Marvel de 1982 à 1996. J’ignore toujours aujourd’hui si elle fut pensée comme une mini-série unique ou le début de quelque chose appelé à se développer. De toute façon, c’est lors de son élaboration que Wagner et Grant, jusque-là plutôt potes malgré des relations souvent houleuses, se disputent pour de bon. Il est aussi possible qu’Epic n’ait pas vraiment su quoi faire d’une bande dessinée aussi morbide. Quoi qu’il en soit, trente ans plus tard et malgré une fin relativement ouverte, il n’y a jamais eu de suite. Or, c’est justement cette ambiguïté qui rend le destin du personnage principal si pathétique et triste. Vingt ans après un conflit nucléaire global, Ulysses S. Pilgrim, le dernier Américain sur Terre, est en effet automatiquement sorti d’un caisson d’hibernation avec pour mission de retrouver des survivants, de leur apprendre les valeurs américaines et de relancer le pays. Et devinez quoi? ATTENTION SPOILERS. Il ne trouve personne. Doom. Gloom.
DES ROMANS
Puisqu’on est damnés, voici un aveu: autant je cultive une admiration sans borne pour son hallucinant, halluciné et hallucinogène western Méridien de Sang, autant Cormac McCarthy m’avait bien déçu avec The Road. Certes, c’est plus un concept qu’une histoire bien ficelée, mais tout de même… « Après avoir bu la dernière gorgée de Coca-Cola de la planète, il amusa l’enfant en rotant l’alphabet » ou je ne sais plus trop quoi, ça m’avait assez interloqué. Et pas du tout convaincu. Vu la surreprésentation du bouquin dans les rayons de librairies de seconde main, je ne dois pas être le seul à m’être endormi dessus, d’ailleurs. Heureusement, des romans ayant pour thème les derniers jours de la vie humaine sur Terre, il en existe de bien meilleurs. Je n’en ai à vrai dire lu que très peu mais mon petit doigt tendu dans le vent radioactif me dit que cette liste compilée par Lithub doit malgré tout plus tenir de l’engin balistique hypersonique de type Satan II que du MK-54 Davy Crockett tout rouillé (snul-kit « missiles porn »). Autrement dit, voilà des heures et des heures de lecture plaisante pour faire filer les années de bunker!
UNE AUTRE CHANSON
En 1983, on passe à un cheveu de la guerre nucléaire accidentelle alors que John Lydon, ex-Johnny Rotten, se fait torturer par Harvey Keitel dans le film Copkiller, alias The Order of Death. Cela n’a aucun rapport mais c’est après avoir vu ce très sympathique nanar qu’Afrika Bambaataa et le producteur Bill Laswell décident, quelques mois plus tard, d’inviter Lydon a chanter sur World Destruction, deuxième single de Time Zone, scorie ayant pour thème l’anéantissement atomique de la civilisation. Ils veulent quelqu’un de complètement dingue et ils sont bien servis. Fort improbable, la chanson sonne comme du Kraftwerk punk et braillard, s’enregistre en quelques heures, ne rencontre pas tout à fait le succès mérité, est largement oubliée depuis mais… n’en reste pas moins complètement détonante! Quelle patate! Quel rouleau compresseur de folie furieuse! Autrement dit, le meilleur antidote à la morosité quand on se sent déprimé par les errances de ciboulot de Vladimir Poutine! Le front haut, les épaules en arrière, en avant vers l’horizon glorieux!
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