Album - The Car
Artiste - Arctic Monkeys
Genre - Rock
Label - Domino/V2
Sur The Car, L’album le plus calme et cinématographique des Arctic Monkeys, Alex Turner sort le grand jeu et joue les chanteurs de charme.
Il est compliqué de vieillir dans le rock. Surtout quand on a pris le monde par surprise et sauvé la couronne avant de pouvoir descendre des Guinness au pub. Les Arctic Monkeys étaient encore des sales gosses qui brossaient des interviews pour aller se promener sous la tour Eiffel quand ils ont sorti en 2006 leur premier album: l’impeccable Whatever People Say I Am, That’s What I’m Not. Alex Turner a aujourd’hui 36 ans. Et si on n’a pas toujours été convaincu par les disques de ses singes savants, il a depuis longtemps vaincu l’immaturité et l’acné. Septième Arctic Monkeys du nom, The Car est une voiture de collection. Un ancêtre. Une de ces caisses qu’on sort le dimanche ou pour les grandes occasions mais qui a un peu de mal à dépasser les camions. The Car est un album cool des Monkeys. Avec ses ambiances cinématographiques et ses orchestrations ambitieuses, il ressemble sans doute d’ailleurs davantage à un disque des Last Shadow Puppets, le groupe que partage Alex Turner avec son pote Miles Kane, qu’au gang de jeunes morveux qui a ramené la guitare au cœur de l’Angleterre.
Il a fallu un peu de temps pour que les chansons s’ancrent. Pour que les mélodies s’imposent. Pour que la beauté se révèle pleinement. Mais il y a une splendeur assez surprenante qui se dégage de ce nouveau disque. Dans la continuité de Tranquility Base Hotel & Casino (en plus ambitieux et réussi), les Arctic Monkeys calment le jeu et se la jouent chanteur de charme. David Axelrod, Stax, Motown… Il y a des pointes de jazz, du groove, un son funk et des voix soul sur cette collection de dix chansons savamment arrangées. I Ain’t Quite Where I Think I Am (un titre qui rappelle celui de leur premier disque) sonne comme le Superstition de Stevie Wonder et pourrait presque figurer sur la bande originale d’un film de la Blaxploitation. Jet Skis on the Moat est une petit douceur sucrée, un slow sensuel pour faire craquer les filles. Là où Body Paint se la joue plus théâtral (les draps de satin de Prince et une rupture à la Tommy des Who).
Majoritairement composé au piano, The Car n’est pas sorti facilement de l’usine. Les premières tentatives d’écrire cet album remontent au printemps 2019. Avec même quelques sessions d’enregistrement qui ont suivi à l’hiver. Mais c’est après les confinements, durant l’été 2021, que le groupe de Sheffield s’est retrouvé. Comme le faisaient jadis Led Zep et les Stones, il est parti en retraite à la campagne avec son vieux collaborateur James Ford et a enregistré au Butley Priory, un ancien monastère non loin de la côte. The Car est assez confondant de douceur. Rien ici ne fera grimper les voisins aux rideaux ou débarquer les flics pour tapage nocturne. Mais il y a des idées, des cordes et une majestuosité qui prend ses aises. Ils avaient déjà postulé sans succès; les Arctic Monkeys peuvent plus que jamais prétendre au générique d’un prochain James Bond.
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