Mississippi Driver

Lorsqu’il repère devant un hôpital le énième client cintré du jour, Lou Bishoff, prof de lettres défroqué reconverti en taximan pour cas sociaux du fin fond du Mississippi, ne se fait pas d’illusion:  » Je sais immédiatement que c’est mon client, mon destin« . À l’instar de son auteur, riche d’un CV comparable et produit du même cocktail « Hawaïen transféré chez les rednecks », il convoie en journée une clientèle de taulards, camés, mourants et -rayon de soleil- vieilles dames indignes, dont on n’ose imaginer sans frémir ce qu’ils rendraient de nuit. Placées sous le haut patronage de Shakespeare, Faulkner et Harry Crews, ses aventures, servies par une plume incroyable de talent, convoquent aussi fantômes, bêtes sauvages et ovnis taquins… soit une folle épopée quotidienne, qu’il ne peut supporter qu’en se gavant de Red Bull et d’anxiolytiques. Mais s’il ne cesse d’adresser, effaré, des doigts d’honneur à la Terre entière, son empathie, son permanent sentiment de culpabilité et sa haine légitime pour les gosses de riches le rendent immensément humain, immergé à son corps défendant dans un océan cradingue fait de faillite sociale et de pestilences tenaces. Ici, Lee Durkee atteint, à l’aise, la perfection.

De Lee Durkee, éditions Flammarion, traduit de l’anglais (états-unis) par nicolas richard, 302 pages.

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