L’ADN de Woodstock. Woodstock n’est pas seulement la mère de tous les festivals, mais aussi l’événement jeune le plus significatif du vingtième siècle.
Par Elliott Landy, éditions Fetjaine.
Six cent mille spectateurs, un million et demi de personnes supplémentaires bloquées dans un périmètre de trente kilomètres autour d’un site complètement paralysé par l’affluence, Jimi Hendrix, Janis Joplin, The Who, Creedence, Sly & The Family Stone et une vingtaine d’autres groupes prêts à entrer dans la légende. Ce furent donc les trois jours de Paix et de musique tenus du 15 au 17 août 1969 à Bethel, un coin campagnard du nord de l’Etat de New York, à 69 km du village de Woodstock. Et un livre – un de plus – pour fêter le quarantième anniversaire qui approche. Certes, on aurait pu laisser tomber l’ajout sur la couverture d’un peace sign flanqué du slogan Le livre qui sent l’herbe (…), c’est ringard. Mais cet ouvrage collectif sous la direction du photographe Elliot Landy constitue un témoignage qui dépasse l’hommage de circonstance. Malgré un layout sans génie, le bouquin est ferme, électrique et sensible parce qu’il canalise la mythologie absolue du « premier festival rock » (même si c’est faux, il y avait déjà eu le californien Monterrey en 1967) et une série d’images qui donnent le tempo d’une génération. Woodstock est l’ADN du mouvement hippie, ses globules blancs et rouges, son scanner et son squelette combinés. Le livre raconte ce climax de « contre-culture » en deux temps. Il y a les textes signés de quelques noms fameux (le journaliste Greil Marcus, l’organisateur Michael Lang) mais aussi d’une série de participants plus anonymes. Parmi ceux-ci, Lisa Law, membre de la Hog Farm, recrutée pour faire manger six cent mille personnes à coups de semoule de blé.
Méga-trip communautaire
On sent passer le boulet des intempéries noyant le festival de pluie – d’où les belles images dans la boue… – mais rien ne semble entamer l’esprit collectif d’un demi-million de personnes embarquées dans un méga-trip communautaire. A peine trois morts en autant de jours (deux maladies fulgurantes, un accident) et aucune overdose mortelle: good vibrations.
Une douzaine de photographes – dont Landy, Baron Wolman et Henry Diltz – témoignent de ce moment unique, saisissent en noir/blanc et en couleurs les stars incandescentes – magnifique Hendrix dans la lumière de l’aube – et la foule d’une jeunesse prise entre l’hédonisme du moment et les spectres contestataires de l’Amérique de la fin des sixties.
Le festival, payant, deviendra – de fait -un événement gratuit simplement parce que des dizaines de milliers de personnes sont déjà sur place avant que les barrières d’entrée ne soient posées. Les factures mettront du temps à se régler: le film et le disque tirés de l’événement aideront à éponger les dettes. Mais peu importe, comme le dit Michael Lang, l’organisateur de l’événement, vingt-quatre ans à peine à l’époque: » De toute évidence, un esprit supérieur régnait sur tout cela. Woodstock, c’était cosmique, magique. » Le livre le rend parfaitement bien.
Philippe Cornet
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