Super Pumped
Les médias ont célébré les entrepreneurs mégalos de la tech, héros et héroïnes de la start-up nation. Le monde des séries, lui, se repaît de leur chute, dézingue les mythes fondateurs de la disruption, de tromperies mesquines en délires égotiques ( The Dropout, WeWork). Nouvel avatar de cette fascination , Super Pumped façonne le portrait de Travis Kalanick, cofondateur et PDG de Uber, en Icare chargé comme un sprinter du Tour. La série raconte l’avènement d’une culture d’entreprise toxique au point de causer sa propre déchéance. Délicieusement possédé, Joseph Gordon-Levitt est un Kalanick galvanisé, narcissique, dépourvu de tout surmoi. L’alpha et l’oméga du mâle à la tête d’un boys club qui concentre toutes les problématiques qu’Uber a fait naître dans son sillage. Adaptant le livre du journaliste du New York Times Mike Isaac, le duo derrière Billions s’amuse de nombreuses ruptures stylistiques et crée un univers où le quatrième mur est en option. Super Pumped démarre plutôt bien et fait résonner sur sa route toutes les casseroles d’Uber: ambiance sexiste, espionnage des conducteurs et des journalistes, déshumanisation du personnel, finances mensongères. Pour ce qui est des conditions de travail des chauffeurs, de la démission collective en faveur d’un modèle qui dépiaute le tissu social, on reste sur sa faim. Idem pour une analyse un tant soit peu étayée des conditions d’émergence d’une personnalité aussi problématique que Kalanick. Du coup, l’intérêt s’éteint à mi-parcours, les batteries scénaristiques en mode économie.
Série de Brian Koppelman et David Levien. Avec Joseph Gordon-Levitt, Kyle Chandler, Kerry Bishé.
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