Oliphant ***1/2
Les grandes explorations ont toujours attiré une faune étrange et bigarrée. Celle du capitaine Oliphant ne déroge pas à la règle. Nous sommes en 1914 et, auréolé par la réussite de sa précédente expédition, le voilà reparti à la conquête de l’Antarctique. Y embarquent entre autres son fils Arkadi, héroïnomane en plein sevrage, Snark, son second polyglotte, Walter Deliddell, fils du financier de l’expédition parti tester une nouvelle collection de vêtements contre le froid, ainsi qu’un photographe, des scientifiques, cuistots et autres hommes de bord. Loo Hui Phang s’est inspirée de la vie d’Ernest Shackleton, dont le navire a été pris dans les glaces, contraignant l’équipage à passer l’hiver sur place. La scénariste jongle habilement avec des phrases philosophiques lourdes de sens énoncées devant la vacuité de la vie, et des préoccupations plus terre à terre, telles celles de M. Deliddell quant à la tenue de ses vestes en peau de jeunes rennes aux coutures goudronnées, ou encore les délires du jeune Arkadi, dont les histoires font oublier pour un temps aux hommes leur condition épouvantable. Le dessin de Benjamin Bachelier traduit, si pas les 93 termes des Inuits pour désigner la glace, du moins une grande partie de ces multiples variations. Sa sensibilité de peintre lui permet d’utiliser judicieusement le vide, qu’il rehausse des couleurs rouges pour le sang, gris bleu pour la mer et les icebergs, et le marron pour le bois de charpente et la terre ferme. Enfin, le choix de définir en tête de chapitre les grands phénomènes qui régissent les courants océaniques nous rappelle la petitesse de l’Homme face aux éléments.
De Loo Hui Phang et Benjamin Bachelier, éditions Futuropolis, 256 pages.
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