Mon papa dessine des femmes nues
Avant tout, il est important de préciser que l’Hippolyte qui est crédité au générique de cet album de Philippe Dupuy est le fils d’à peine 10 ans de ce dernier et non l’auteur de bande dessinée au graphisme protéiforme. Depuis quelques années, Philippe Dupuy expose ses réflexions sur les arts plastiques. L’auteur avait dessiné chez le même éditeur une superbe histoire de l’art sous forme de leporello (mais oui, ce livre en accordéon). Dans J’aurais voulu faire de la bande dessinée (Futuropolis), il s’interrogeait sur les rapports entre musique et bande dessinée. Cette fois, c’est au travers du regard d’un enfant que l’auteur interroge notre rapport à l’art. Les questions du gamin portent, par exemple, sur la multitude de nus féminins qui peuplent la peinture. Mais également sur la noirceur de pas mal d’oeuvres. L’auteur tente alors de lui en expliquer les pourquoi. Sa réflexion le mène vite au-delà de son sujet et déborde sur la parentalité tardive et la culpabilité qui l’accompagne, sans oublier la sempiternelle question de savoir si faire de l’art, c’est un vrai métier. Philippe Dupuy marque ici une rupture flagrante avec son ancienne collaboration avec Charles Berberian. Il se dégage de l’album une sensibilité exacerbée. Son dessin très fragile et délicat à la plume s’apparente à la gravure, plus proche de l’artisanat assumé que de la BD traditionnelle, laissant visibles les ratures et autres gommages au Tipp-Ex. Il expérimente également le dessin à la main gauche, doublé de collages de photos de paysages et mélange les dessins de son fils aux siens. Son trait flirte par moments avec l’abstraction, affichant ainsi la volonté de s’affranchir des frontières qui régissent les différentes disciplines artistiques.
De Philippe Dupuy avec Hippolyte, éditions Dupuis/Aire libre, 168 pages.
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