FELIX VAN GROENINGEN CONFIRME AVEC THE BROKEN CIRCLE BREAKDOWN UN STATUT QUE DE HELAASHEID DER DINGEN LUI AVAIT APPORTÉ DE SPECTACULAIRE FAÇON.

A poil et à vélo! C’est nu et à bicyclette, comme les héros de son film, que Felix van Groeningen avait parcouru le chemin menant à la notoriété internationale. C’était sur La Croisette, au Festival de Cannes, où sa Merditude des choses avait fait sensation, avant de remporter un gros succès dans les salles belges (surtout flamandes). Deux ans plus tard, le jeune cinéaste fait son retour avec The Broken Circle Breakdown, une £uvre plus commerciale mais loin d’être impersonnelle pour autant. A 35 ans, le Gantois confirme sa position de réalisateur tout à la fois original et accessible pour un large public, doté d’un grand talent narratif et d’un assez remarquable flair visuel. L’inspiration de son nouveau film, il l’a trouvée dans une pièce de théâtre…

 » Le succès de La merditude des choses m’a surpris, avoue van Groeningen, on espère tous ça mais quand ça vient on ne sait pas vraiment comment réagir. Tout d’un coup, je recevais plein de demandes, plein de scénarios. On se pressait autour de moi et ça me rendait dingue! Alors je suis parti trois semaines dans le sud de la France, dans une maison à Avignon, seul, pour réfléchir à ce que j’allais pouvoir faire. J’ai repensé à cette pièce que j’avais vue huit mois auparavant, et que j’avais revue quelques semaines plus tard tellement je la trouvais intéressante… tout en ne voyant pas comment je pourrais en faire un film! » Le cinéaste eut comme une épiphanie artistique, l’apparition dans son esprit d’une évidence:  » Ce truc infaisable était à faire! » Ceux qui ne sauraient pas qu’il s’agit au départ de théâtre ne l’imagineraient sans doute pas, tant le film est en tous points cinématographique. « J’ai tout de suite su que je ne respecterais pas la chronologie, commente Felix van Groeningen, et aussi que j’essaierais d’aller au-delà de la mort. J’ai tenté et raté plein de choses, j’ai plusieurs fois pensé que j’avais eu tort de me lancer là-dedans, mais j’ai persisté… à tort ou à raison. »

Emotion pictures

La quantité d’émotions contenue dans un récit fiévreux, violent dans les sentiments, posait un autre défi au réalisateur.  » J’ai cherché toutes sortes de solutions formelles pour à la fois porter cette émotion et en même temps éviter que le film étouffe. Et là, j’ai plusieurs fois paniqué, à l’écriture, au tournage et au montage, en me demandant si tous ces styles allaient pouvoir faire un tout… « , commente un van Groeningen soucieux de  » faire circuler le flux émotionnel sans que le spectateur puisse s’y noyer. » The Broken Circle Breakdown explore au passage, comme le faisait La merditude des choses, une facette particulière de la société au nord du pays: celle des passionnés d’Americana, qui vibrent aux notes de la country et (comme ici) du bluegrass, tout en se la jouant western dans le paysage flamand.  » Sans doute avons-nous un peu forcé le trait dans le film, entre autres avec la maison qui ressemble à un ranch, mais c’est vrai que j’adore aborder un milieu précis et tenter de le comprendre, y compris dans sa dimension fantasmatique« , explique le réalisateur qui a été déçu dans ses recherches initiales parmi des passionnés  » qui font les danses et tout mais qui souvent n’ont pas de style, reproduisant juste un folklore, avec des musiques très moches. » C’est en rencontrant Bjorn Eriksson, qui a composé la musique du film, que van Groeningen a compris  » que cette culture un peu cow-boy pouvait bien exister en Flandre, et être belle, cool, loin des clichés« .

Face à une émouvante Veerle Baetens, Johan Heldenbergh, auteur et acteur de la pièce, endosse le rôle dans le film.  » Je ne me sentais pas obligé de le prendre, déclare le cinéaste qui avait déjà dirigé Heldenbergh dans Steve + Sky et La merditude des choses, d’autant que notre « contrat » de départ était que je pourrais transposer sa pièce avec la plus totale liberté, y compris de faire le film sans lui… » S’il a finalement choisi Johan pour incarner Didier, c’est après avoir passé ses autres options au crible de ce qu’il appelle ses  » doutes nécessaires« .  » Le doute est indispensable, conclut Felix van Groeningen, pour peu qu’il ne vous empêche pas d’avancer, il vous fait avancer plus vite! » Et d’annoncer qu’il fera sans doute son prochain film « contre » celui-ci, plutôt que de continuer dans une voie qu’il vient, il est vrai, d’explorer avec intensité. l

TEXTE LOUIS DANVERS

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