le grand retour de douglas kennedy avec son dernier roman quitter le monde, un drame psychologique doublé d’un suspense fascinant.
J’ai rencontré Douglas Kennedy dans un charmant hôtel parisien, au goût de bonbon anglais, à l’occasion de la sortie de son nouveau roman: Quitter le monde (critique ci-contre). En pleine promo et bousculé par les événements de sa vie privée, il a dans le regard quelque chose d’un enfant perdu qu’on a envie d’aimer.
Dans vos livres, on sent un paradoxe entre les personnages qui tentent de fuir une structure, un train-train quotidien, mais qui, en même temps, y trouvent leur salut. Ces personnages vous ressemblent-ils?
Tout le monde pense qu’un roman est naturellement autobiographique. Mais je n’ai jamais assassiné une femme, ni fait de dépression post-natale! Pourtant, je suis très proche de Jane, ma narratrice. J’ai aussi eu une enfance difficile, avec des parents qui se sont tout le temps disputés. La chose la plus importante pour moi, est d’avoir évité les tentations d’autofiction, comme c’est souvent le cas en France. S’il y a des éléments autobiographiques dans mes romans, ils sont cachés. Ma vérité n’est pas LA vérité.
Dans Piège nuptial, vous dites » s’affairer, se stresser, permet d’oublier la futilité lamentable de nos existences ou le cul-de-sac dans lequel nous nous débattons. Un cul-de-sac que nous nous sommes invariablement choisis. » Pensez-vous encore ça aujourd’hui?
Absolument! C’est un des grands thèmes de mes romans. Je pense que tout le monde construit son propre piège. La plupart des gens ont peur de la liberté qui est un rêve. En même temps, c’est difficile de vivre de manière existentielle. La critique la plus bienveillante est quand les lecteurs me disent que je partage leur solitude et leur point de vue. Tout le monde cherche une raison d’être dans la vie, mais dans le fond on est toujours seul.
Ne vous sentez-vous pas quelquefois prisonnier de votre succès?
Non. Si j’avais aimé la célébrité, j’aurais été emprisonné par elle. J’aime le succès, mais je ne me sens pas piégé par ça. Chaque roman est un défi. C’est essentiel de douter pour créer. On doit lutter tout le temps avec soi-même.
Dans vos écrits, vous abordez l’ambition, le sens de la famille, la pulsion à vouloir à tout prix (re)construire un couple. Etes-vous dans ces principes-là? Vous aimez visiblement aussi vous mettre en danger…
Une vie sans danger n’est pas une vie. J’ai toujours fui ce qui était trop simple. C’est pour ça que je suis romancier! Il y a des dangers nécessaires et des dangers stupides, comme fumer ou conduire trop vite.
Est-ce que vous culpabilisez si vous n’écrivez pas une journée?
Tout le temps! La culpabilité est très importante pour un écrivain. L’écriture est un métier et une discipline. J’écris tous les jours. Là, je travaille sur un scénario pour Patrice Leconte: Best seller.
Il y a un côté David Lynch chez vous… Tout va bien, puis tout bascule dans le cauchemar. On pense aussi à Seul contre tous de Gaspar Noé. Le cinéma étant une de vos passions…
J’ai beaucoup de respect pour Lynch et Noé, mais je me sens en dehors de ça. Moi j’utilise la vie quotidienne dans mes romans. J’essaie de rester sincère et de garder une dimension humaniste. Dans mon dernier livre, la vie de Jane est une poursuite. Jane, c’est aussi moi.
Si un jour, vous aviez le sentiment d’avoir dit tout ce que vous aviez à dire dans l’écriture, que feriez-vous?
Je serais chef d’orchestre! Parce qu’on contrôle tout mais qu’en même temps, on a besoin des autres.
Qu’est-ce qui vous a touché dans l’actualité dernièrement?
L’élection d’Obama. J’en ai pleuré, surtout après un connard comme Bush… l
Nadine Monfils
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