Le tango du Melingo
Le label Musique Sauvage offre une rétrospective au Tom Waits de Buenos Aires, Au Paolo Conte argentin.
Musicien, auteur, compositeur, acteur et présentateur de télévision, Daniel Melingo est aussi une voix. Une voix exceptionnelle, rocailleuse, éraillée, qui n’est pas sans rappeler celle de Paolo Conte et de Tom Waits. Même si lui se réclame du grand Edmundo Rivero (1911-1986), dont son beau-père fut jadis l’impresario. Melingo n’a pourtant commencé à chanter que la quarantaine passée, après s’être activé dans un paquet de groupes en Argentine et en Espagne.
Daniel Melingo est né le 22 octobre 1957 à Buenos Aires. Multi-instrumentiste, il a appris la clarinette au conservatoire avant d’étudier la musicologie et la composition à l’université. Son parcours, c’est à la fois une histoire politique de la musique et une histoire mélomane de l’Argentine. En 1978, Daniel fuit la dictature et part s’installer au Brésil où il rejoint le groupe de Milton Nascimento. Quand il rentre au pays quatre ans plus tard, c’est pour animer les tranchées du rock contestataire (Los Twist, Los Abuelos de la Nada). Melingo est un empêcheur de danser en rond. Et quand il crée Lions in Love à Madrid en 1986, c’est pour mélanger le funk, le reggae et les accents latinos. Le dub, le tango, la soul et le flamenco…
Daniel est un bourlingueur. Il faut dire que le voyage, il a ça dans les veines. Il est issu d’une famille d’immigrés de Trieste. Son grand-père paternel, surnommé El Turco, était d’origine grecque et sa grand-mère a été cantatrice à la Scala de Milan. On ne met pas tous les enfants coucher en écoutant du Ravel…
Dandy trash
Connu comme le dandy trash du tango argentin, mi-rocker mi-crooner, Melingo est un homme libre et inclassable. Tangos décalés, romances interlopes et chansons de vagabond… Musique d’insomniaque et récits des bas-fonds… L’album S’il vous plaît se promène dans la carrière et la discographie du bonhomme entre 1998 et 2016. 1998, l’année de son premier album de tango, » une musique de chambre tombée dans le caniveau« , comme il aime à la décrire. Revendiquant l’esprit que lui insufflaient les taulards, Melingo aime mettre en scène les paumés et chante volontiers en lunfardo, un argot de Buenos Aires qui mêle l’espagnol au français et à des dialectes italiens. Le tout saupoudré d’une bonne dose de verlan…
Eduardo Makaroff, l’un des fondateurs de Gotan Project, a ouvert à Melingo les portes de l’Europe en le sortant sur son label, Mañana. Mais l’Argentin à la conception très visuelle de la musique reste encore trop méconnu. Cette compilation en 23 titres est l’occasion de réparer cette injustice et de tomber en pâmoison devant ce mec qui a pris des cours de chant mais qui veut que sa musique reste imparfaite pour ne pas oublier la crasse de ses origines. Dirty dancing…
TANGO
Melingo
« S’il vous plaît »
Distribué par Musique Sauvage.
8
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