QU’ELLE EXPLORE LES CLICHÉS DU TERROIR, SINGE SES MODÈLES AMÉRICAINS OU FASSE L’ÉLOGE DE LA GLANDE, LA COMÉDIE FRANÇAISE SENT LE PÂTÉ AU RAYON BLU-RAY.
Qu’est-ce qu’on a fait au Bon Dieu?
DE PHILIPPE DE CHAUVERON. AVEC CHRISTIAN CLAVIER, CHANTAL LAUBY. 1 H 37. DIST: TWIN PICS.
2
Babysitting
DE PHILIPPE LACHEAU ET NICOLAS BENAMOU. AVEC PHILIPPE LACHEAU, ALICE DAVID. 1 H 25. DIST: COMING SOON.
1
Libre et assoupi
DE BENJAMIN GUEDJ. AVEC BAPTISTE LECAPLAIN, CHARLOTTE LE BON. 1 H 34. DIST: COMING SOON.
4
Le pitch a tout d’une mauvaise blague Carambar: un couple de la grande bourgeoisie de province (Chantal Lauby et Christian Clavier, forcément crédibles en aristos fachos, pardon gaullistes) a quatre filles, la première a épousé un musulman, la deuxième un juif, la troisième un Chinois et la quatrième s’apprête enfin à se marier avec un bon catholique, sauf qu’il est noir… Enorme carton populaire lors de sa sortie en salles, Qu’est-ce qu’on a fait au Bon Dieu? s’attaque donc à la question de la mixité armé d’un humour-tractopelle: grimaces, quiproquos, jeux de mots navrants, dialogues déclamés à la façon d’un mauvais vaudeville, catalogue identitaire d’un autre temps, clichés quinze fois plus gros que ceux -raciaux- que le film entend épingler… Ce monument de beauferie autosatisfaite est le United Colors of Benetton du rire gras et baveux. « Elle est belle, la France! » En effet…
Français jusqu’au fond de la bouteille de calva, le film de Philippe de Chauveron pointe au rayon Blu-ray exactement au même moment qu’une autre tartignolerie hexagonale, mais pour le coup aux modèles avoués américains: Babysitting, pantalonnade hystériquement djeune où des trentenaires coincés au stade anal saccagent la maison des parents réacs du gosse dont leur pote (Philippe Lacheau, sosie camembert de Bradley Cooper) a la charge sous de festifs prétextes. Si les influences sont amerloques -on navigue à vue, et sans inspiration, entre Superbad, The Hangover et même Project X pour le côté found footage qui semble devoir justifier 85 minutes d’images cadrées avec les pieds-, l’humour, lui, reste désespérément franchouillard, entre répliques désolantes -« Le jour où t’organises un dîner de cons, tu pourras manger tout seul« – et jeu d’acteurs inexistant -on fait des gros yeux ronds du début à la fin tellement on vit un truc de ouf. Le fait qu’il ait fallu deux réalisateurs et pas moins de quatre (!) scénaristes pour « penser » cette chose n’en finissant pas de laisser songeur…
Autant dire qu’à côté de ces deux nanars certifiés, Libre et assoupi de Benjamin Guedj, sympathique histoire d’un bac+10 bien décidé à ne rien faire de sa vie, aurait facilement pu faire office de pierre philosophale du rire en boîte. Sauf que, beaucoup trop gourmand, cet éloge fainéant de la paresse cherche confusément et tout à la fois le gag, la réflexion philosophe et l’émotion. Soit le beurre, l’argent du beurre et le sourire de la crémière de la comédie à la française. Le film, plein d’un aquoibonisme calculé et de formules à l’emporte-pièce à même de plaire aux adolescents les plus attardés -genre « C’est dommage que la réalité manque d’imagination« -, s’abîmant en outre dans un final atrocement conformiste qui achève d’en désamorcer le moindre potentiel de subversion.
NICOLAS CLÉMENT
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