Delair, Clouzot
“ Ces lettres ne méritent d’êtres lues qu’en revoyant les films dont elles sont la coulisse”, écrit l’historien du cinéma Noël Herpe dans sa remarquable introduction à son Delair, Clouzot. Voire: si elle invite en effet à se replonger dans L’assassin habite au 21, Le Corbeau et autre Quai des orfèvres, cette correspondance inédite -lettres, télégrammes, cartes postales- se suffit aussi à elle-même, qui raconte la relation passionnée qui devait unir le réalisateur Henri-Georges Clouzot à la pétulante comédienne Suzy Delair onze années durant, de 1938 à 1949. Non sans éclairer un pan de l’Histoire du cinéma français sous l’Occupation, ni l’un ni l’autre n’ayant été, comme le rappelle l’auteur, des foudres de guerre anti-nazies, travaillant pour la Continental, société de production allemande établie à Paris. Si cette époque trouble en constitue la toile de fond, c’est toutefois dans leur histoire d’amour que réside le fil rouge de cet ouvrage, entamée alors qu’ils en sont encore l’un et l’autre à manger de la vache enragée, Clouzot se mettant en scène en pygmalion de Suzy. Elle s’épanouira avec la reconnaissance tandis qu’ils s’inventent l’un et l’autre -il l’a distribuée dans un premier rôle dans L’assassin habite au 21, le film qui consacre ses débuts de réalisateur; il lui confiera encore le rôle, à résonance autobiographique, de Jenny Lamour dans Quai des orfèvres. Entre-temps, leur histoire a connu des hauts et des bas, que documentent ces lettres où affleure leur intimité, le désir attisé par les périodes d’éloignement à répétition, mais aussi une angoisse sourde, sensible dès 1939 -“ il vaut mieux tuer notre amour que le laisser agoniser pitoyablement”-, et actée dix ans plus tard par leur séparation.
De Noël Herpe, avec Jacqueline Willemetz, éditions Marest, 112 pages.
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