Youtube va-t-il enterrer la télévision ou simplement la reformater pour la Gen Z?
Les Youtubeurs étaient censés casser les codes et enterrer la télévision. De plus en plus souvent, ils reprennent pourtant ses formats.
Ca ressemble à de la télé, ça a le goût de la télé, mais ce n’est pas (tout à fait) de la télé. Ca s’appelle Popcorn. Et même si l’émission a tout du talk-show classique, c’est sur la plateforme de streaming Twitch que ça se passe -avant d’être reposté sur YouTube. C’est l’un des nombreux exemples de programmes ciblant les internautes, avec des formats qui se rapprochent toujours plus de ceux de la… télévision. Tout ça pour ça?
Au départ, les youtubeurs étaient pourtant censés « casser les codes ». Au point de faire trembler la bonne vieille télé linéaire, tout à coup détrônée de son monopole des écrans. De fait, le vieux média a subi, comme tout ceux issus de « l’ancien monde », le choc digital. Chaque chaîne a réagi selon ses armes. Par exemple en lançant sa propre plateforme. Ou en regardant de plus près les écrans des ados pour voir exactement ce qui s’y tramait.
Frontières poreuses entre Youtube et télévision
Impossible par exemple d’imaginer aujourd’hui une émission de divertissement sans son youtubeur/influenceur -que ce soit sur Quelle époque!, le talk-show de Léa Salamé le samedi soir sur France 2, ou dans Danse avec les stars sur TF1, pour ne parler que des deux plus gros « poissons » du PAF. L’inverse est d’ailleurs vrai. Désormais, les personnalités télé n’hésitent plus à investir le Net -l’exemple de Samuel Étienne, passant de Questions pour un champion à Twitch.
De fait, les frontières deviennent poreuses. Avec pour conséquence de voir les formats YouTube s’aligner de plus en plus sur les modèles connus? Si Popcorn a tout du talk classique, Zen, l’émission de Maxime Biaggi, reprend pour bonne partie la grammaire des late show. De la même manière, les caméras cachées de Greg Guillotin sont une suite, à peine plus trash, de celles de François l’Embrouille, et les facéties d’Average Bob jamais très éloignées de celles de Jackass sur MTV. Quant aux escapades d’Inoxtag ou SEB, elles auraient pu figurer dans un épisode de Rendez-vous en terre inconnue, présenté par Ben Névert, le « Frédéric Lopez de YouTube ».
Le bon ton
On exagère? OK, un peu. Mais quelles réelles différences cultivent encore les youtubeurs? Même mécanismes, mêmes invités… Tout est dans le ton, nous souffle-t-on. Et la manière de consommer les formats, conçus pour être découpés, « snackés » à souhait. « Nous ne voulions pas forcément concevoir une émission opposée à la télévision mais plutôt adaptée aux codes de la nouvelle génération », expliquait ainsi encore récemment, au Figaro, l’animateur Domingo, à la tête de Popcorn. Sans doute la manne dont bénéficient aujourd’hui les youtubeurs-stars contribue aussi à s’aligner sur certains standards. Interrogée dans Libé, Clara Lesage, à la tête de la boîte de production de Squeezie, le youtubeur français le plus suivi, expliquait au début de l’année: « Le digital s’est construit sur la débrouille, mais maintenant on se « staff », on recrute des grosses équipes: réal, assistante réal, chef opérateur, ingé son, la totale. On a ramené les méthodes de la télévision sur YouTube. »
Paradoxalement, la vidéo la plus visionnée l’an dernier en France est l’épisode de Qui est l’imposteur avec Éric et Ramzy. Tourné dans ses bureaux, c’est l’un des formats les moins chers de Squeezie. Comme quoi, YouTube mène à tout. À condition d’y rester? ●
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