Atomic Blondes
Adrien Gombeaud dresse le portrait de dix actrices façonnées par Hollywood pour être des “doubles” de Marilyn..
On n’en a jamais fini avec Marilyn Monroe. Démonstration il y a quelques mois avec Blonde, l’impeccable film biographique que lui consacrait Andrew Dominik. Ou, aujourd’hui, avec cet essai d’Adrien Gombeaud, critique à la revue Positif et au quotidien Les Échos, qui, sous le titre Des blondes pour Hollywood, s’attache à retracer le destin, tragique le plus souvent, de celles que l’usine à rêves, dans sa quête inlassable de nouvelles blondes atomiques à même de suppléer l’originale, devait promettre à une gloire forcément éphémère.
Elles sont dix, comme autant de chapitres d’un roman noir californien, à être croquées par l’auteur au fil de ces pages où le rêve hollywoodien vient se fracasser sur la réalité beaucoup plus prosaïque des lendemains qui déchantent et de l’oubli, définitif le plus souvent. Si Jayne Mansfield a certes eu droit a sa part de légende, qui pour se souvenir de la Britannique Diana Dors et de sa statue en bronze à Swindon, présentant “cet équilibre si british entre le kitsch le plus exubérant et la mélancolie d’un passé révolu”? Ou de Mamie Van Doren, de son vrai nom Joan Hollander, originaire du Dakota du Sud -8 417 abonnés quand même sur son compte Twitter qu’elle continue à alimenter à 92 printemps bien frappés-, seule rescapée de cet enfer doré?
Jeunes aventurières affranchies
L’ouvrage d’Adrien Gombeaud se lit comme un hommage à ces femmes restées en rade de la gloire de celluloïd, le générique alignant encore les noms de Corinne Calvet, Liz Renay, Barbara Payton, Barbara Nichols, Joi Lansing, Sheree North et Anna Nicole Smith, “la Marilyn tragique de la génération plastique”. Si leur histoire, celle de “jeunes aventurières affranchies”, est souvent assez voisine jusque dans son issue funeste, l’auteur, non content de leur reconnaître à toutes un talent au moins, leur prête un destin collectif: “Ensemble, dans la douleur, elles ont pavé le chemin de la génération plus libérée des années 1960 et de Kennedy. Celle-là même qui devait les évincer impitoyablement.”
Partant, ce livre esquisse aussi le portrait en creux d’une époque révolue, un Hollywood où pouvait germer ce “fantasme de producteur: inventer une “nouvelle Marilyn”. Tel le docteur Frankenstein, façonner dans les laboratoires de l’usine à images une créature en tout point similaire, aussi drôle et sexy que l’originale, mais plus malléable, ponctuelle et docile”. Des silhouettes vouées à rester dans l’ombre par définition, mais qui n’en relatent pas moins “la difficulté d’être des femmes indépendantes et ambitieuses dans un monde façonné par des hommes carnassiers et affamés”. Après tout, la légende ne rapporte-t-elle pas qu’apprenant la mort de Marilyn Monroe, le 5 août 1962, Harry Cohn, le boss de la Columbia, s’exclama: “Trouvez-moi une autre blonde!”…
Des blondes pour Hollywood – Marilyn et ses doubles ***1/2
D’Adrien Gombeaud, éditions Capricci, 144 pages.
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