Apocalypse miaw

© National

Stray questionne la nature de notre humanité en enfilant la peau d’un chat. Un trip cyberpunk imparfait mais attachant.

Les chats et l’apocalypse sont dans l’air du temps. Aussi populaires l’un que l’autre sur les réseaux sociaux, YouTube et Netflix, ils n’ont, a priori, rien en commun. Mais le studio montpelliérain Blue Twelve brasse ces deux thèmes avec un saisissant aplomb sur Stray. Ce jeu indé d’exploration, de plateforme et d’aventure saisit les griffes d’un chat de gouttière coincé dans une cité cyberpunk vidée de tout être humain. Le jeu comble un vide gaming car la dernière tentative de gameplay félin notable et solide remonte à 1994, avec Le Roi lion sur Megadrive.

Entre-temps, des kilomètres de productions casual ou indés drolatiques comme Neko Atsume ou le bien nommé Catlateral Damage ont ronronné. Sans oublier Night in the Woods. Mais à l’image de l’approche anthropomorphique et existentielle de ce dernier (le temps qui passe, les gens qui changent), le jeu vidéo a pris jusque-là ses distances avec tout réalisme félin. À l’opposé de cette tendance, Stray donne au gamer les commandes d’un chat banal. Séparé de sa meute, il tombera sur une civilisation d’androïdes étranges en essayant de rentrer chez lui. En déballant des robots humanoïdes qui imitent de manière parfois grotesque nos modes de vie, Stray pose habilement la question de la nature de notre humanité. Leur cité, inspirée de la défunte citadelle de Kowloon(1) à Hong Kong, évoque par moments la beauté triste des décors industriels d’Inside de Playdead. Habitée depuis des siècles, cette ville sans nom ne capte d’ailleurs jamais la lumière du jour.

Quatre pattes, un destin

D’un robot qui a renoncé à ses croyances (d’un monde au-delà du dôme) à un guitariste de rue, cet urbanisme sous cloche déteint avec talent sur les protagonistes des lieux. Ces derniers sont autant de prétextes à de petites missions de diverse importance. Trouver de la poudre à lessiver, des bouts de câble pour confectionner un pull, des pages de partitions musicales… Le volet aventure du jeu pousse à l’exploration de ce quasi- bidonville. Le tout pour jouer aux coursiers d’un point A vers un point B avec l’aide d’un drone interprète.

Sans carte GPS, Stray demande d’ailleurs un certain sens de l’observation pour s’orienter dans son level design plutôt vertical. Mais ses phases de plateforme contrarient la liberté viscérale des félins. Le jeu opte ainsi pour un système de sauts automatisés via des points prédéterminés. D’une gouttière à une corniche, l’objectif sera donc ici de trouver le bon chemin, pour par exemple accéder à un appartement.

Traversé d’une poignée de puzzles environnementaux demandant entre autres de tirer sur une serviette pour ouvrir un tiroir, Stray jongle entre plusieurs petites idées de gameplay. Des phases de courses un peu arcade demandent d’échapper à des essaims de “Zirks”. Quelques passages d’infiltration et de “tir” de rayon lumineux colorent également ses 6 heures de jeu. Mais à force de manger à tous les râteliers, le jeu manque de consistance. Reste que malgré ces défauts, Stray est très mignon et attachant. Une tactique éprouvée par nos amis les chats…

Stray

édité par Annapurna Interactive et développé par Blue Twelve Studio, âge: 12+, disponible sur PC, PlayStation 4 et PlayStation 5.

8

(1) Considéré comme le quartier le plus dense du monde, cet îlot de HLM entassés de façon improbable a été rasé au début des années 90.

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Partner Content