Cette biographie de Gil Scott-Heron, poète, militant et chanteur noir américain considéré à tort ou à raison comme “le parrain du rap” -comme le rappelle un peu vainement le sous-titre de ce roman graphique qui n’avait pas besoin de ça-, n’est pas tout à fait une biographie. Bien sûr, on y retrace ses origines, sa carrière, son génie, ses grands albums (de Pieces of a Man en 1971 avec le morceau phare The Revolution Will Be Not Televised, jusque 2010 et son crépusculaire I’m New Here, enregistré un an avant sa mort), sa descente aux enfers pavée de coke, de séjours en prison et d’épidémie de sida, en plus de quelques moments très forts (tel Kanye West entamant un concert à l’enterrement de Scott-Heron, pourtant mort seul à l’hôpital des indigents). Mais comme le dit le titre, cette fois fort à propos: cet album parle aussi, surtout, de la quête de l’auteur français Thomas Mauceri sur les traces de cette idole qu’il a traquée près de quinze ans… Et qu’il ne rencontrera jamais, à une heure près. Une tragédie qui se raconte en parallèle de celle de Scott-Héron, et qui, elle aussi, traverse l’Histoire récente des États-Unis, d’élection en élection, pour tisser au final une réflexion profonde et fouillée sur la cause afro-américaine, et par-delà, sur l’africanité même de l’auteur, d’origine congolaise. Avec une irrésistible envie qui s’installe dès les premières planches nerveuses et habitées de Sébastien Piquet: lire le tout avec la funkitude et le spoken word de Scott-Heron dans les oreilles. Un bel hommage.

de Thomas Mauceri et Sébastien Piquet, éditions Les Arènes BD, 228 pages.
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