[le livre de la semaine] American Predator, de Maureen Callahan: de sang-froid
La journaliste américaine Maureen Callahan signe un true crime cauchemardesque autour de l’affolante épopée du tueur en série Israel Keyes.
« L’homme dont il est question dans ce livre a chamboulé les convictions des agents du FBI eux-mêmes. C’était un monstre d’un nouveau genre. Un monstre qu’on soupçonne d’être responsable de la plus grande série de disparitions et de meurtres non élucidés de l’Histoire américaine contemporaine« , écrit l’autrice en préambule à ce livre enquête qui se dévore comme le plus terrifiant des thrillers. De fait, American Predator est non seulement un récit criminel addictif, mais il parvient aussi à surprendre les amateurs de séries comme Mindhunter. Comme quoi, il y a encore moyen d’inaugurer dans l’horreur pure et la folie tout court.
La nuit du 1er au 2 février 2012, Samantha Koening, 18 ans, s’apprête à mettre fin à son service dans un coffee stand d’Anchorage, en Alaska. Elle ne rentrera jamais chez elle. Seule piste exploitable pour les enquêteurs: des images de vidéosurveillance où la jeune fille est emmenée sous la menace d’une arme par un inconnu. Quasiment un mois plus tard, au Texas, la police interpelle Israel Keyes. Père de famille et bosseur acharné, Keyes est selon la formule consacrée un homme au-dessus de tout soupçon. Sauf qu’il est en possession de la carte de crédit de Samantha Koening. Rapidement extradé vers Anchorage, il devient le suspect numéro 1 de la disparition de l’adolescente.
Jamais en sommeil
Maureen Callahan a rencontré pendant de longues heures la plupart des agents du FBI qui se sont retrouvés sur l’affaire. Elle a eu également accès à des extraits d’interrogatoires du FBI, parfois retravaillés et condensés par souci de clarté pour un résultat vertigineux. Tous les témoignages concordent. Israel Keyes est un tueur en série totalement atypique parce qu’il s’en prend aussi bien aux hommes qu’aux femmes ou aux couples, et ce aux quatre coins des États-Unis. Grâce aux confidences lâchées au compte-goutte, les enquêteurs apprennent médusés que l’intéressé possédait des caches de crime dissimulées dans tout le pays avec tout l’attirail (menottes, armes, etc.). Pervers, manipulateur, violeur, nécrophile et même braqueur, Keyes « n’est jamais en sommeil« . Et même lors d’interrogatoires poussés, il parvient à ne révéler que d’infimes informations sur des meurtres qui pourraient lui être imputés tout en concédant, sans baisser les yeux, d’autres méfaits.
American Predator est de la trempe de De sang-froid, le chef-d’oeuvre de Truman Capote. On peut également le rapprocher de Dévorer les ténèbres de Richard Lloyd Parry et de Avec le diable de James Keene et Hillel Levin (tous deux chez Sonatine). Du costaud!
American Predator
Enquête. De Maureen Callahan, éditions Sonatine, traduit de l’anglais (États-Unis) par Corinne Daniellot, 360 pages. ****(*)
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