Sally Rooney, Gallimard
Intermezzo
464 pages
Difficile de faire abstraction du phénomène éditorial qu’est devenue Sally Rooney au moment d’aborder son quatrième roman, Intermezzo, pour lequel elle est publiée pour la première fois chez Gallimard, et qui sort simultanément dans le monde entier.
Rock-star récalcitrante de la littérature mondiale, les trois premiers romans de Sally Rooney se sont vendus à plus de six millions d’exemplaires, et celui-ci devrait suivre le même chemin. Mais que vaut-il, ce nouvel opus de la championne de la romcom hypermoderne? Il a toute notre attention à tout le moins, et sûrement notre admiration devant sa façon de s’emparer avec une agilité et une sincérité confondantes des questionnements amoureux qui habitent les millenials.
Après avoir traité du couple et de l’amitié, elle se penche cette fois-ci sur la famille, à travers les trajectoires particulières de deux frères désunis par la mort de leur père. Alors que Peter, avocat qui approche de sa midlife crisis mène une vie dissolue à Dublin, son cadet de dix ans Ivan oublie dans les échecs le désert de sa vie sentimentale. Quand le premier navigue entre son amour de jeunesse qui a pris ses distances suite à un accident, et sa jeune maîtresse un peu trop indépendante, le second trouve l’amour là où il ne le cherchait pas, auprès d’une femme de quarante ans. Le traitement que fait Rooney de ces atermoiements amoureux est cependant bien plus subtil que cette exposition sommaire, notamment dans sa façon toute personnelle d’intégrer les dialogues à l’action du récit, et d’écrire des scènes de sexe où le consentement déploie une charge érotique toute particulière. Mais la grande affaire de Rooney reste surement le passage à l’âge adulte, nos résistances quand il s’agit de quitter pour de bon l’enfance, et de poser ou pas des choix de vie en pleine confusion des sentiments.
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