À l’image de la fluidité des genres, le projet Fluide explore de nouvelles possibilités dans le domaine de l’entertainment.
Au départ, il y a une web série sur Arte, scénarisée par Joseph Safieddine et Thomas Cadène et réalisée par Sarah Santamaria-Mertens. Le propos? Le couple d’aujourd’hui, l’exploration sexuelle… et la création artistique. Léo (Simon Thomas) et Waël (Matthias Jacquin), amis dans la vie et co-auteurs d’une série de bande dessinée étiquetée « heroic fantasy », voient leur vie amoureuse chamboulée par leurs partenaires respectives. Envie d’expérience saphique pour l’une et d’explorations diverses pour l’autre. Ils décident d’en faire la chronique dans un nouveau projet BD.
Safieddine et Cadène, avec l’aide du dessinateur Benjamin Adam qui prêtait déjà son trait (graphique) à l’écran, ont adapté Fluide en bande dessinée et ont eu la bonne idée de prendre des libertés avec le scénario, tout en respectant le propos de base. Ce qui donne: Jeanne, en couple avec Hector, dans un souci de transparence, annonce à son amant qu’elle aimerait faire l’amour seule avec une fille. Fair-play, elle lui propose de vivre ses expériences de son côté. Hector, complètement perdu, s’en ouvre à son ami Sacha avec qui il fait de la BD. Sacha est célibataire, plus par la force des choses que par choix… Autour d’une bière, dans leur « stamp café », ils se prennent à imaginer ce qu’aurait fait William -leur personnage de papier à l’aise dans toutes les situations- avec le canon qui vient d’entrer dans l’établissement… Et les voilà littéralement transportés dans le corps de William: la fête du cul peut commencer.
1.0benjamin_adam_Instagramhttps://www.instagram.com/rich658
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Web versus papier
Magie de la bande dessinée, le scénario prend des allures fantastiques que la web série, budget oblige, ne peut se permettre. Benjamin Adam poursuit l’exploration graphique opérée dans son précédent album Soon. Son dessin se fait psychédélique et coloré lors des ébats de William avec ses conquêtes, ou dans les posts du gaillard sur Instagram. Il se fait beaucoup plus réaliste lorsque le dessinateur représente les Waël et Léo de la série en train de dessiner la BD, entraînant le lecteur dans une vertigineuse mise en abyme. Autre avantage du papier sur l’écran, les auteurs ne sont pas tributaires du jeu -pas toujours à la hauteur- des acteurs. Dans la série, Sacha/Waël est atteint d’un TOC lié à l’hygiène corporelle et vit avec Esther, jeune femme plutôt libérée sexuellement. Ce qui donne quelques scènes savoureuses de sexe pas très décontractées mais très drôles. En revanche, le personnage de Jeanne/Emma ne convainc pas à l’écran: autant celle de papier en impose par sa détermination, sa stature et son physique, et nous touche réellement par le retour de bâton qu’elle se prend dans la gueule; autant son alter ego à l’écran minaude et sa fragilité frise le gnangnan. Le propos sur les deux supports reste pourtant très intéressant et bien traité, avec une préférence pour la bande dessinée, plus sombre et plus touchante.
Fluide
de Thomas Cadène, Joseph Safieddine et Benjamin Adam, éditions Dargaud, 100 pages. ****
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