María José Ferrada, Quidam
Kramp
139 pages
“Une seule vis peut précipiter la fin du monde si elle est mal fixée.” C’est l’un grands des principes que D, représentant de commerce pour Kramp (quincaillerie en tout genre), a inculqué à sa fille M devenue assistante lors de ses tournées et ce, dès l’âge de 7 ans. La gamine, délurée et analytique en diable, a vite fait d’assimiler quelles autres règles régissent l’univers de ceux qui dédient leur vie à la vente itinérante, au point de proposer ses services (une panoplie de regards et sourires enfantins bien placés, prompts à attendrir ou à endormir la vigilance du client) à S. C’est un autre membre de cette famille choisie de guingois, de ceux qui gravitent toujours autour de la cafétéria érigée en véritable quartier général. La mère de M, qui avait fixé un cadre pour éviter les absences scolaires, est hantée par ses propres fantômes et ne met donc pas le holà. Nous sommes au Chili, au cœur des années Pinochet, et tout ce qui semblait jusque-là si indéboulonnable va pourtant se disloquer. Qui est E, le photographe que D dépose toujours dans un village sans quincaillerie? Qui sont les fantômes qu’il veut immortaliser avec obstination, au point peut-être de mettre D et M en danger? Pour ce premier roman pour adultes, María José Ferrada nous livre un récit initiatique à la tonalité singulière et une héroïne ultra-attachante. Dans ce microcosme en chapitres courts régi par le Grand Ordonnateur, l’autrice ne rebouche pas entièrement les trous des énigmes posées par son texte, encourageant le lecteur à se mettre à l’établi pour laisser le sens transpercer. Fabuleux!
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