Critique | Livres

Été: Ali Smith boucle ses quatre saisons britanniques

4 / 5
Ali Smith © Aliin Ferrara

Ali Smith, éditions Grasset

Été

368 pages

4 / 5
Fabrice Delmeire Journaliste

Sasha et Robert, 16 et 13 ans, font l’expérience du confinement à Brighton avec leur mère célibataire. La rencontre avec un couple d’écrivains travaillant sur les formes dans l’art et la nature vient aiguillonner les convictions des ados en révolte. “L’art saturé d’inconscient agit comme un rêve compensatoire: il tente de rééquilibrer et de traiter des problèmes profondément enracinés.Difficile à résumer, le livre d’Ali Smith emprunte son titre fil rouge tantôt comme une route, tantôt comme un socle. L’été s’y décline en propositions surprenantes. Débutant mezzo forte, ce roman vagabond essaime bientôt du côté des rafles et de l’internement au Royaume-Uni durant la Seconde Guerre mondiale… Pour mieux revenir à la situation actuelle des migrants en centre de rétention. S’il s’inscrit dans un cycle romanesque autour du Brexit, ce volume estival se parcourt indépendamment, aussi libre que sa forme. Sans chercher à “faire des phrases”, l’imbrication des récits et temporalités dessine une fresque du monde comme il va, avec ses soubresauts et ses renoncements, mais toujours brossée avec subtilité, empathie, jusque dans ses révoltes. Aux passing-shots du roman à thèse, le style de l’Écossaise privilégie les lobs et les amortis. Il sera question du génie d’Einstein, de Franz Kafka et du vol des martinets annonçant le retour de l’été. Lequel ne brille pas qu’au dehors mais aussi, parfois, à l’intérieur d’une belle rencontre, avec un inconnu et le moment présent. Ici, un livre: iconoclaste, subtil, tentaculaire. “Un livre devrait être une hache qui sert à briser la mer gelée en nous.” Une réussite!

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