Critique | Livres

Anna Funder réhabilite celle qui a inspiré George Orwell

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Anna Funder © DR

Anna Funder, Héloïse d'Ormesson

L'Invisible Madame Orwell

496 pages

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Derrière chaque grand homme il y a une femme, dit la sagesse populaire. Derrière George Orwell également, selon Anna Funder.

Avec L’Invisible Madame Orwell, Anna Funder s’applique à mettre en lumière la façon dont non seulement George Orwell a été soutenu, nourri, inspiré, motivé, enrichi aussi bien intellectuellement que matériellement par sa femme Eileen O’Shaughnessy, mais aussi comment cette dernière a été constamment invisibilisée. « Comment fait-on disparaître une femme? », se demande-t-elle, comme on se demanderait comment on fait disparaître un corps.

Orchestrant de vertigineux aller-retours entre son présent d’écrivaine, qui se prend « à envier à ces grands écrivains » du XXe siècle « leurs conditions de travail », et celui d’Eileen, qu’elle entreprend de faire revivre en lui réinventant un passé, Funder voyage dans le temps, visite Eileen combattante effacée de la Guerre d’Espagne par les récits héroïques de son mari, poétesse inspirée qui a « vu » 1984 auquel le romancier emprunte quelques idées, la cachant méthodiquement derrière des « tournures impersonnelles » pour dissimuler l’agentivité des femmes en général et de sa femme en particulier. Ce fascinant livre-enquête d’Anna Funder, riche de sources et d’échappées fictionnelles, rappelle que si l’on peut séparer l’homme de l’artiste (ou pas), on peut rarement séparer l’artiste de sa femme.

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