Les séries B seventies aux sources des pandémies au cinéma…

The Crazies (La Nuit des Fous Vivants, George A. Romero, 1973) © DR
Serge Coosemans
Serge Coosemans Chroniqueur

C’est en 1919, l’année où Otto Rippert sort La Peste à Florence, sur scénario de Fritz Lang, qu’une pandémie s’invite pour la première fois au cinéma. Le genre « catastrophe virale » ne décollera toutefois véritablement que durant les seventies, avec notamment ces 5 films plus ou moins cultes, plus ou moins connus et plus ou moins regardables… Crash Test S05E26, le top-5 après lecture duquel il est impératif de se laver les mains!

The Andromeda Strain (La Variété Andromède, Robert Wise, 1971)

Depuis Westworld, avec ses cow-boys androïdes qui tuent des touristes prisonniers d’un parc à thème, et Jurassic Park, avec ses tyrannosaures en goguette dans un autre parc à thème, feu Michael Crichton traîne la réputation d’avoir comme principal ressort scénaristique la science qui se détraque. À ses débuts, il semblait pourtant moins intéressé par l’exploitation des worst case scenarios que par l’idée beaucoup plus originale de faire naître l’horreur de la banalité répétitive et aliénante. Ainsi, dans Westworld, son film de 1973, il y a certes Yul Brynner et son six coups qui préfigure bel et bien le Terminator mais on a surtout des scènes interminables et vraiment glauques de personnel en blouses blanches occupé à réparer des robots et à communiquer via des systèmes de transmissions aussi sophistiqués que dépersonnalisés. Pareil ou presque dans La Variété Andromède, film que Crichton n’a cette fois pas réalisé mais que Robert Wise a fidèlement adapté de l’un des premiers gros succès littéraires de l’auteur: on y voit surtout des scientifiques regarder dans des microscopes et… ça stresse en fait pas mal.

L’histoire est simplette: un satellite d’observation de la stratosphère s’écrase près d’une petite ville d’Arizona avec un virus inconnu accroché à la carlingue. La population du coin est décimée, on ne retrouve que deux survivants: un vieillard alcoolique et un enfant en bas âge. Ceux-ci sont ramenés et étudiés dans un bunker secret de l’armée, qui a la particularité d’être programmé pour s’autodétruire par le feu nucléaire en cas de propagation virale. C’est tout.

Il ne se passe pas grand-chose d’autre… Le malaise et l’horreur naissent des gestes répétitifs des scientifiques, de leurs doutes, des drills de sécurité, des ordres reçus de l’administration militaire, des ordinateurs qui turbinent à la recherche d’une solution… Le bouquin avait carrément poussé le vice jusqu’à se présenter comme un rapport secret déclassifié, truffé de statistiques, de pages de codes et expliquant en langage administratif le protocole de destruction nucléaire des endroits contaminés. Bref, le message de Crichton était clair: l’administratif arbitraire est drôlement plus pétochant que les virus inconnus puisque eux, au moins, s’adaptent et mutent. « Nature finds its way« , en d’autres termes…

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The Cassandra Crossing (Le Pont de Cassandra, George Pan Cosmatos, 1976)

Nanar de luxe, Le Pont de Cassandra tenta de surfer sur la vague alors fort bankable des films catastrophe au casting de superstars. Les immeubles en feu (La Tour Infernale), les avions en détresse (la série Airport) et les bateaux de croisière dans la semoule (L’Aventure du Poséidon) ayant tous déjà été utilisés, la production décida de bourrer Sophia Loren, Richard Harris, Ava Gardner, Burt Lancaster, Martin Sheen et OJ Simpson dans… un train. Un Genève-Stockholm (passant par Bruxelles) où s’infiltre, après un attentat raté dans un labo américain secret, un terroriste infecté par le virus militarisé de la peste pneumonique. Autant dire que tousser dans son coude ne lui sert pas à grand-chose, le type étant plus contagieux et dangereux que le Docteur Banner dans un Colruyt un jour de razzia sur le PQ. La suite délire pas mal: les passagers du train étant à 60% contaminés et les militaires américains n’ayant pas fort envie d’avouer au monde qu’ils travaillaient sur la guerre bactériologique dans des laboratoires secrets EN SUISSE (!!!), il est décidé que tout ce beau monde sera mis en quarantaine dans un ancien camp de concentration nazi qui se trouve juste derrière un vieux pont tellement rouillé et inusité que celui-ci pourrait bien s’écrouler sous le poids d’un train moderne. Bref, tu parles d’un masterplan qui, comme on s’en doute, ne met par ailleurs pas vraiment tout le monde d’accord dans le train. Une fronde populaire s’ensuit donc, qui sera surtout l’occasion pour Sophia Loren d’user de la pétoire et pour Richard Harris de toucher un gros chèque en se fichant complètement d’avoir l’air concerné et crédible dans son rôle de neurologue d’une rare intelligence et d’une aptitude certaine au coup de poing, visiblement bourré dans chaque scène et pas non plus hostile à l’idée de simuler quelques papouilles à Sophia Loren. Après, si on aime des militaires en costume BioHazard dégommant arbitrairement des civils, ce qui est tout de même la base de tout bon film d’infection virale, ce navet peut malgré tout tenir des deux heures de fun familial à peine déviant. Du Romero pour mémés, en d’autres termes!

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The Crazies (La Nuit des Fous Vivants, George A. Romero, 1973)

Ce bon vieux George Andrew Romero, parlons-en. En 1973, cinq ans après son fameux Night of The Living Dead, il tourne ce film qui ressemble à un film de zombies mais sans zombies, ce qui donnera l’idée très yolo à son distributeur français de le rebaptiser « La Nuit des Fous Vivants« ! C’est évidemment tourné à l’arrache, pas très bien monté, pas très bien joué. C’est de l’exploitation pure et simple, pompant d’ailleurs beaucoup The Andromeda Strain puisqu’ici aussi, une petite ville américaine est placée en quarantaine pour tenter de contenir la propagation d’un virus bizarre et ici aussi personnel militaire, scientifique et politique se montre assez arbitraire et vite dépassé. Mais comme on est chez Romero, c’est évidemment très violent, tout le monde est très bête et c’est aussi malgré tout plutôt rigolo puisque le virus rendant les gens cinglés, la présence de l’agent infectieux dans leur organisme leur font d’abord faire de grosses conneries avant de les rendre véritablement dangereux. Et puisqu’on est chez Romero, ça ne finit forcément pas très bien. Un bon conseil: évitez le remake propret de 2010 et osez la souche originale.

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The Omega Man (Le Survivant, Boris Seagal, 1971)

Très souvent passé à la télévision durant les années 70/80, The Omega Man est l’un de ces films hollywoodiens basé sur un roman célèbre (I Am Legend de Richard Matheson, 1954) dont il ne retient rien, sinon vaguement le nom de quelques personnages. Dans le bouquin, un virus transmis par des chauves-souris (hahaaa!) transforme les gens en vampires (hohooo!). Dans le film, les retombées contagieuses et mortelles d’une guerre bactériologique entre Soviétiques et Chinois atteignent les États-Unis et l’Europe, tuant pour ainsi dire tout le monde, sauf Charlton Heston, qui s’est injecté un vaccin expérimental juste avant que Los Angeles ne soit touchée par l’infection… Mais comme le dit le slogan publicitaire « le dernier homme sur Terre n’est pas tout seul« . La nuit tombée, une bande de mutants défigurés, dingues et luddites, menée par un ancien présentateur télé adepte de grands discours grandiloquents vient danser sous ses fenêtres.

Vous imaginez la suite: Charlton assure la publicité pour ses amis de la NRA en dégommant ces hippies à l’aide de toute une panoplie de flingues sophistiqués et en leur balançant à la poire des punchlines aussi cyniques que déplacées une bonne quinzaine d’années avant que Schwarzenegger, Stallone et Willis ne fassent de ce procédé comique un cliché à la mode. Heston y couche aussi avec une femme noire, « première scène d’amour interraciale du cinéma convenable« , et finit par retrouver d’autres humains immunisés à protéger de la tribu de mutants, qui se fait appeler La Famille, comme la bande à Charles Manson. Bref, c’est assez basique et c’est surtout au niveau des grilles de lectures que The Omega Man trouble les esprits. Il y a en effet moyen de voir tout et son contraire dans ce film. Pour les uns, il est profondément réac, une histoire de vieux mâle blanc dominant de droite pro-flingues butant des jeunes représentants pacifiques d’une société nouvelle, ainsi qu’une figure symbolique des médias. Pour d’autres, c’est une déconstruction du mythe Charlton Heston, que l’on voit pleurer devant Woodstock, Le Film et qui y a notoirement préféré y finir crucifié, comme pour se moquer de ses rôles bibliques l’ayant rendu célèbre, alors qu’un happy ending était pourtant prévu. C’est surtout un blockbuster de SF nihiliste et adulte comme il s’en produisait beaucoup avant que Star Wars n’impose une approche plus légère, kids friendly et spatiale du genre… Pour la petite histoire, The Omega Man est l’un des films préférés de Tim Burton, qui reconnaît pourtant sans problème qu’il n’est pas vraiment bon.

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No Blade of Grass (Terre Brûlée, Cornel Wilde, 1970)

Si l’idée d’une pandémie durable ne pouvant être contrôlée qu’au prix de sacrifices énormes vous stresse, oubliez ce film! Pareil si vous êtes vegan, d’ailleurs. No Blade of Grass nous projette en effet dans une apocalypse où un virulent virus asiatique rend la nourriture d’origine végétale impropre à la consommation, ce qui cause de gigantesques famines et d’encore plus gigantesques émeutes. Au point que la seule solution pour assurer un avenir à l’humanité est d’en gazer un tiers! Comme d’habitude dans ce genre de films, une petite bande de mauvais citoyens a beaucoup de mal à accepter cette solution finale et se met dans l’idée de vite quitter la quarantaine de mise à Londres, où ça se bat par ailleurs cruellement pour le dernier roastbeef à la menthe. Leur but: le Westmorland, coin campagnard au nord du pays beaucoup plus tranquille et carrément idéal pour élever des veaux. Leur chemin ne sera évidemment pas sans embûches: cannibales à la recherche d’un casse-dalle, bikers ivres d’alcool et de culture du viol, fermiers peu partageurs de leurs réserves en bocaux et soldats un rien fachos à la gâchette leste. Bref, c’est Mad Max en duffelcoat et comme souvent dès qu’un film, même américain, est tourné au Royaume-Uni, c’est assez cru et franchement sordide. Même si ça vieillit plus mal que le sherry, c’est sûr…

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