Titre - Incroyable mais vrai
Genre - Comédie
Réalisateur-trice - Quentin Dupieux
Casting - Avec Alain Chabat, Léa Drucker, Benoît Magimel
Durée - 1h13
Avec Incroyable mais vrai, Quentin Dupieux signe une drôle de comédie, où l’étrangeté se drape d’angoisse existentielle. Bien dans l’air du temps…
Un film à Berlin en février, un autre à Cannes en mai: Quentin Dupieux semble atteint de frénésie créative. Si Fumer fait tousser n’a pas franchement bouleversé la Croisette il y a quelques jours – “rigolade très épisodique”, écrivait Nicolas Clément sur le site de Focus -, il en allait autrement d’Incroyable mais vrai, présenté hors compétition à la Berlinale voici quelques mois, et dont le titre un peu cheap dissimulait un Dupieux grand cru . Le réalisateur du Daim y met en scène un couple dans la cinquantaine, Alain (Chabat, déjà de Réalité) et Marie (Léa Drucker), s’apprêtant à acheter une imposante villa dans un environnement désolé. La maison est un peu trop grande, la carcasse de bagnole abandonnée au fond du jardin donne à ce dernier des allures de décharge, mais, comme ne se fait faute de leur préciser le vendeur (Stéphane Pezerat), la demeure recèle, sous une trappe à la cave, un atout-maître, sous la forme d’un mystérieux conduit ayant le don de bousculer la temporalité. Conquis, les voilà faisant aussi sec l’acquisition de la présumée maison de leurs rêves, où ils reçoivent bientôt un couple d’amis se trouvant compter parmi leurs rares voisins, Gérard (Benoît Magimel), ci-devant patron d’Alain, et Jeanne (Anaïs Demoustier). Lesquels, au cours du dîner qui s’ensuit (objet d’une scène d’anthologie), vont leur faire une révélation guère moins stupéfiante, relative à un gadget révolutionnaire en provenance du Japon. Le bonheur à portée de banlieue résidentielle? C’est compter, bien sûr, sans l’une ou l’autre faille…
Sagesse désabusée
Pneu tueur dans Rubber, dressage de mouche géante dans Mandibules…, Quentin Dupieux n’est pas de ceux que l’absurdité d’une situation est de nature à effrayer. Quitte, parfois, comme dans ce dernier, à voir sa mécanique loufoque tourner quelque peu à vide. à cet égard, Incroyable mais vrai marque un regain sensible d’inspiration. Étrangeté et minimalisme du cadre, bizarrerie à tendance surréaliste du contexte: si l’on est incontestablement dans son univers, le réalisateur l’amène, sans jamais se départir de son humour décalé, en terrain sensible. Et la fable, qui convoque aussi bien Alice au pays des merveilles que Le Portrait de Dorian Gray, brasse, l’air de rien, des thématiques on ne peut plus contemporaines, – recouvrant tout à la fois l’obsession de la jeunesse, les relations de couple et, pourquoi pas, jusqu’à diverses déclinaisons de la masculinité. Non sans traduire limpidement, derrière ce qui épouse les contours d’une fuite en avant délirante, une angoisse existentielle bien dans l’air du temps. Sur quoi un Chabat, en qui l’on serait tenté de voir ici l’alter ego du cinéaste, porte un regard empreint de sagesse désabusée. Incroyable mais vrai? Voire…
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