Le Bruit de la couleur, une expo pour donner le goût de l’art aux plus jeunes
Exposition itinérante, Le Bruit de la couleur s’installe en région liégeoise. Son but: initier les regardeurs en herbe au langage de l’art contemporain à partir de sa composante chromatique.
Quel sens peut-il y avoir à intéresser les enfants à l’art contemporain? Aucun, répondront les sceptiques pour qui la création artistique actuelle relève d’une vaste fumisterie. Le Bruit de la couleur, une proposition itinérante déployée sur trois ans, défend la position inverse: les petits, particulièrement entre 4 et 8 ans, auraient tout à gagner de l’exposition aux pratiques artistiques d’aujourd’hui. “Ouvrir les enfants à l’art contemporain, c’est les engager sur une voie de tolérance et d’empathie, c’est également les initier à d’autres formes de sensibilité”, explique Marjorie Ranieri, curatrice indépendante de l’événement mais également maman et doctorante dans le domaine de la médiation culturelle -elle est en passe de terminer une thèse sur la question de la dimension politique de l’œuvre du Français JR. Difficile de rester sourd à cet argument à un moment où chaque jour qui passe semble sacrer un peu plus la défaite du dialogue, la radicalisation des débats. Il restait encore à dessiner les contours de cette exposition, dont la forme est envisagée comme un jeu évitant le dissuadant “Merci de ne pas toucher!” régulièrement opposé aux petits regardeurs dans les musées.
Inaugurée il y a quelques jours à la Châtaigneraie, la première concrétisation de ce projet qui se posera dans plusieurs endroits à géométrie variable -centres culturels ou bibliothèques- permet de prendre la mesure d’un calibrage agile opéré au départ de la collection de La Fondation Province de Liège pour l’Art et la Culture. La structure fluide et atypique du Bruit de la couleur puise ses fondamentaux dans le parcours, sensibilisé aux nuances de perception induites par la nature des outils de médiation mobilisés. Le choix de la thématique de la couleur n’est en ce sens pas innocent, l’approche chromatique étant utilisée dans de nombreuses méthodes d’éducation (notamment la pédagogie Montessori) afin d’aiguiser le regard de l’enfant ou de renforcer son raisonnement logique.
Attaché à la multi-sensorialité, Marjorie Ranieri creuse le sillon de la couleur dans le sens de la synesthésie, phénomène neurologique bien connu consistant à associer, par exemple, des mots ou des sons à des couleurs. Autre exemple emblématique de l’acuité du propos: la Liégeoise a sollicité des plasticiens liégeois émergents -Mathilde Quewet, Michel Leonardi et Jean-Paul Gaucher- pour imaginer des dispositifs tactiles et immersifs servant de catalyseurs entre le jeune public et les artistes de la collection. “J’ai cherché un équilibre juste entre l’appropriation par le toucher et la contemplation”, confie-t-elle. La rencontre intergénérationnelle proposée est le lieu d’une multiplication des médiums, du textile à l’image en mouvement, permettant de mesurer la richesse de l’art contemporain. Un temps fort? Ce tipi élaboré par Michel Leonardi, artiste travaillé par les interactions entre l’espace et la lumière. Cette tente indienne chromatique s’avance comme un refuge à partir duquel les enfants prennent connaissance de l’environnement immédiat, notamment une œuvre vidéo en noir et blanc toute proche.
Le Bruit de la couleur, à La Châtaigneraie, Flémalle, jusqu’au 10/03.
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