Lapa la nuit

La meilleure manière de visiter un quartier en une nuit est de se dédoubler. N’étant pas encore doué du don d’ubiquité, il ne nous reste plus que cette chouette invention scénaristique: le récit choral. Lapa est un quartier chaud situé non loin du centre de Rio de Janeiro où se mêlent les gens des quartiers pauvres, des quartiers riches et depuis quelques temps, les touristes. Justement, commençons par Erika, jeune Allemande en visite au Brésil qui sera le fil conducteur du récit. Elle y croisera tour à tour Fabio le taciturne et sa copine Joana, qui a des vues sur la blonde. Ils lui feront visiter le quartier en évitant les pièges à touristes. Ils boiront bon nombre de Batida Cachaça servies notamment par Cacique, qui remplace au bar Paulo parti pisser. Mais celui-ci est surtout descendu de sa banlieue à la recherche de la plus belle paire de jambes entr’aperçues la veille dans les brumes de l’alcool. Il dort sur le canapé de Livia, son ex, qui travaille dans un minable hôtel de passe du quartier comme femme de ménage. Margarida en est la réceptionniste, accro aux telenovelas, et le bien bâti Ricardo, le veilleur de nuit. Les clients de l’établissement sont aussi divers que Messias de la police militaire accompagnant le colonel Marques, nostalgique de la dictature, ou que de couples en quête d’intimité. Non loin rôde Marquinhos et sa bande, prêts pour un mauvais coup. Inutile de dire que tout ce petit monde va se croiser et se recroiser pour le meilleur et pour le pire. Nicolaï Pinheiro est brésilien et connaît visiblement bien le coin. Ça se sent: il évite les pièges de la surenchère de détails pour faire couleur locale et démonte au passage quelques a priori dans le chef d’Erika. Malgré la multitude de points de vue, le récit est fluide et l’auteur parvient même à créer une tension digne d’un bon roman noir.

Lapa la nuit

De Nicolaï Pinheiro, éditions Sarbacane, 132 pages.

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