La vie et rien d’autre – Life

© BBC/Drama Republic Ltd

La fabuleuse minisérie Years and Years de Russell T. Davies imaginait une famille de Manchester projetée dans un futur anxiogène, instable et autoritaire. Avec Life, comédie dramatique où familles et individus partageant un même immeuble mancunien traversent divers orages de la vie, Mike Bartlett (Doctor Foster) semble vouloir panser les plaies collectives avant qu’elles ne s’infectent. Sans mièvrerie mais avec un sentimentalisme bien dosé, Life réussit un récit choral poignant, contrasté, profond, dans un esprit feel good assumé.

Quand elle manque de renverser Dawn, amie qu’elle n’a plus revue depuis des années, Gail, 70 ans, ne se doute pas que ces retrouvailles vont changer le regard qu’elle porte sur son mariage et son époux. Jeune femme courageuse, Hannah forme un drôle de triangle avec Liam, son amoureux, et Andy, précédent coup d’un soir dont elle porte l’enfant et qui choisit d’assumer discrètement sa place de père. David tente de fuir un deuil impossible en vacances, où il repousse les avances de l’entreprenante Saira. Belle, la cinquantaine, essaie de contenir son alcoolisme et ses aigreurs en venant en aide à sa nièce Maya, dont la mère est en centre psychiatrique. Ici les éléments extérieurs, les pièces rapportées (le père biologique, l’amie d’adolescence retrouvée, la fille d’une sœur hospitalisée, une étudiante sexuellement proactive) jouent les rôles de révélateurs des abandons et des aveuglements qui, peu à peu, ont imprimé le rythme des vies de chacune et chacun, et installé les stratégies de retrait. Alcool, deuil indépassable, enfantement, oubli de soi.

Rien ne va, on le devine, se passer comme prévu dans ces trajectoires qui dérapent, déraillent, mais dont le changement de voie, si infime ou radical soit-il, ouvre, par la grâce d’un scénario finement amené, de tout autres perspectives, porteuses d’enjeux que les spectateurs n’avaient eux-mêmes pas vus venir. Victoria Hamilton (Doctor Foster, The Crown), Alison Steadman et Peter Davison chapeautent un casting sans faute. Mais autant -si ce n’est plus- qu’à leur prestation, la réussite de ce format dramatique, depuis longtemps usé jusqu’à la corde, tient à la qualité de l’écriture. Une marque de fabrique de la BBC, dont les processus de production et d’accompagnement des auteurs sont si exemplaires qu’ils transformeraient un Plus belle la vie ou un Baraki en machine à Emmys. Life, dès lors, qui ne sort pas non plus de la cuisse de Jupiter, regorge de dialogues travaillés pour être dits, adressés et non fourrés au pied-de-biche dans la bouche des acteurs parce que trop (mal) écrits. Ces vies-là, aussi ordinaires soient-elles, n’exigeaient rien d’autre pour devenir extraordinaires.

Série créée par Mike Bartlett. Avec Alison Steadman, Peter Davison, Victoria Hamilton.

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