La Mostra de Venise consacre Alfonso Cuaron et… Netflix

Alfonso Cuaron © REUTERS
Jean-François Pluijgers
Jean-François Pluijgers Journaliste cinéma

On l’annonçait  » monstre « , avec une sélection à même de soutenir la comparaison avec celle du festival de Cannes, rien moins : la 75e Mostra de Venise a globalement tenu ses promesses, en dépit d’un certain fléchissement dans sa seconde partie.

A l’un ou l’autre oubli près (First Time, de Damien Chazelle, Nuestro Tiempo, de Carlos Reygadas, et Suspiria, de Luca Guadagnino), le palmarès est conforme aux attentes, récompensant les films les plus remarqués tout en saluant les grandes tendances de cette édition. Un Mexicain y succède à un autre sur la plus haute marche du podium, puisque après Guillermo Del Toro (président du jury cette année) avec The Shape of Water, c’est au tour d’Alfonso Cuaron de remporter le Lion d’or pour Roma, drame intime à la résonance toute personnelle. Le réalisateur de Gravity y trace, dans un noir et blanc souverain, le portrait de la servante indienne (l’excellente Yaritza Aparicio) d’une famille de la classe moyenne du Mexico du début des années 70, en un hommage vibrant se doublant de la photographie de la société mexicaine d’alors. Roma était incidemment l’un des trois films battant pavillon Netflix présenté en compétition. Le triomphe est total pour la plateforme de streaming américaine, qui engrange en outre un prix du scénario, un peu léger celui-là, pour The Ballad of Buster Scruggs, des frères Coen.

Le cinéaste grec Yorgos Lanthimos est l’autre grand vainqueur de cette édition, puisque The Favourite, un film d’époque explorant la rivalité entre favorites à la cour de la reine Anne d’Angleterre, repart avec un Grand Prix indiscutable, mais aussi le prix d’interprétation féminine pour Olivia Colman, récompense à laquelle on aurait volontiers associé ses partenaires Emma Stone et Rachel Weisz. Côté comédiens, Willem Dafoe remporte sans surprise la coppa Volpi pour son interprétation aussi mimétique que remarquable de Vincent Van Gogh dans At Eternity’s Gate, de Julian Schnabel, l’un des divers portraits d’artistes découverts lors de cette Mostra. L’impeccable The Sisters Brothers, western insolite suivant l’équipée sanglante et initiatique de deux frères dans l’Amérique des années 1850, vaut encore à Jacques Audiard un prix de la mise en scène assurément mérité. Enfin, un palmarès venant rarement sans fausse note, l’indigeste The Nightingale, de l’Australienne Jennifer Kent, se voit récompensé du prix du jury (ainsi que de celui, moins contestable, du meilleur espoir pour Baykali Ganambarr), manière sans doute de saluer l’omniprésence du cinéma de genre sur les écrans vénitiens…

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