Kimya Dawson, mélodies pour grands enfants
L’ex-Moldy Peaches donnait un concert en toute intimité devant un parterre d’une cinquantaine de personnes à la Maison des Musiques ce mercredi. Forcément touchant…
Dans le bar de la Maison des Musiques, Kimya Dawson paraît être venue passer une soirée en famille et entre amis. Debout derrière sa table de merchandising, la songwriter crève l’écran avec son style à base de tatouages et de patchs en forme de chat cousus sur son jeans. A côté d’elle, sa fille de neuf ans attend patiemment le concert de sa mère, et l’observe faire la discussion avec des fans. La maturité et la confiance qui se lit sur son visage contraste avec l’attitude innocente des jeunes adultes présents dans la salle de concert adjacente.
Assis par terre, les jambes en tailleurs, eux ont les yeux sont rivés sur une scène et écoutent religieusement un homme sans âge envoyer une à une ses ballades folk aux senteurs de Californie. Pas celle ensoleillée et tape à l’oeil de Venice Beach, mais celle brumeuse et qui sent bon le sapin de Big Sur. Kyle Field, performant ce soir sous le nom de Little Wings, ouvrira pour Kimya Dawson sur les dates d’une tournée européenne qui commence ce soir à Bruxelles. Ses petites chansons ne paient pas de mine, mais paient par le phrasé envoutant de Field et le style direct mais subtil de ses lyrics. L’homme et sa guitare, accompagnés tantôt par un mélodica, tantôt par une guitare slidée, posent en tout cas à merveille le décor pour ce qui suit, dans une salle dont les murs semblent se resserrer à vue d’oeil.
Quand c’est à Kimya Dawson de remplacer Kyle Field sur scène, celle-ci fend maladroitement l’audience et dégaine son acoustique couverte de graffitis écrits au feutre noir. La soirée commence à prendre des airs de thérapie de groupe, dont l’ordre du jour serait « love your friends, get weird, don’t care ». L’Américaine, révélée à une génération entière grâce à son omniprésence dans la bande-son du teen-movie Juno, renvoie inexorablement le public à son imaginaire d’enfant au travers de son répertoire (anti)folk. Ici, ça parle géants, chaussettes brodées, mais aussi maladies incurables. Porté par une voix ultra-sensible, le charme qui entoure la scène grandit à mesure des imperfections dans le jeu de l’artiste. Un peu comme si chaque fausse note et chaque trou de mémoire commis par Kimya venait attester un peu plus de l’authenticité d’une chanteuse qui en a fait sa marque de fabrique. Tout comme ses interventions timides entre les morceaux, où elle explique qu’elle a dû annuler ses précédentes tournées européennes à cause de sa phobie de traverser l’Atlantique en avion. On touche au climax au bout de Same Shit/Complicated, une ode à l’empathie de près de sept minutes pendant laquelle la chanteuse déballe ses paroles sur un rythme effréné, si bien qu’on a envie de respirer à sa place entre les couplets. « Looking out the windshield as the world goes by… »
Arthur Sente (stg.)
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