Fin de cycle – Jay-Z boucle sa trilogie entamée en 2001. Convaincant sur une bonne moitié, The Blueprint 3 s’essouffle sur la longueur. Avant de l’emporter aux points. Faute de combattants?

« The Blueprint 3 »

Distribué par Warner.

On ne se méfie jamais assez des suites. Le 11 septembre 2001, Jay-Z sortait The Blueprint. Huit ans plus tard, jour pour jour, le rappeur a lâché The Blueprint 3 (un deuxième volet ayant rapidement suivi, en 2002). Et c’est forcément un petit événement. Parce que l’épisode initial reste encore et toujours l’une des 10 meilleures galettes hip hop de la décennie. Parce qu’entre-temps, le rappeur a également réussi à s’imposer comme le principal poids lourds du rap US. Grâce à son talent, mais aussi un peu par défaut – ses principaux rivaux n’étant toujours pas arrivés à susciter la même aura. Vrai businessman, Shaw Carter, pour l’état civil, est également à la tête d’un empire financier, ayant mis des billes dans la mode, l’immobilier, le basket… D’où son surnom: le CEO, le bonhomme dirigeant par ailleurs son propre label, Roc Nation… Et tant pis si tout cela égratigne d’autant plus une « street credibility », toujours importante à cultiver dans le milieu du hip hop.

Impasse

Lors des dernières élections présidentielles américaines, Jay-Z n’a également jamais manqué de marquer son soutien à Barack Obama. Jusqu’à se présenter aujourd’hui comme « une petite partie de la raison pour laquelle le Président est noir. » Il le clame en ouverture de son nouveau CD, sur le titre What We Talkin’About. Une entrée en matière franchement épatante, tout en nappes de claviers et beats sifflants, et sur laquelle apparaît Luke Steele, du combo rococo-pop australien Empire of the Sun. On se dit alors que c’est bien parti. « Les gens me disent, reviens à ce que tu faisais avant/Mais je suis bien meilleur qu’avant/pourquoi ferais-je une chose pareille? » De facture plus classique, le morceau suivant, Thank You, continue de marquer des points. S’enchaînent alors les deux premiers singles, D.O.A. et Run This Town, qui, sans être ses titres les plus fulgurants, maintiennent le niveau. Plus loin encore, Empire State of Mind repose essentiellement sur le refrain chanté par Alicia Keys, suffisant pour retenir l’attention. Ce sera moins le cas par la suite. Petit à petit, Jay-Z perd en effet le fil. A la production, Kanye West a pris en charge la majorité des morceaux et, hormis l’inexcusable sample de Forever Young d’Alphaville (sic), s’en sort plutôt bien. Timbaland, par contre, comme les Neptunes, donnent l’impression d’être en roue libre. Bilan des courses: une bonne moitié d’album réussie ou ratée, c’est selon. Selon que l’on saluera malgré tout, ou pas, le panache du bonhomme – qui n’avait pas forcément grand-chose à gagner dans l’affaire.

En réalité, la principale qualité de ce Blueprint 3 est d’illustrer parfaitement… l’impasse dans laquelle se trouve actuellement le rap. Genre dominant les hit-parades, il a de plus en plus de mal à se renouveler. Jay-Z en est conscient. Récemment, le patron était aperçu en compagnie de sa dame, Beyonce, à un concert des rockeurs indie de Grizzly Bear. Et d’expliquer: « Ce que réalise aujourd’hui le mouvement indie rock est très inspirant. Cela me rappelle les débuts… J’espère qu’il poussera un peu le rap, en le forçant à de nouveau se bouger pour faire une meilleure musique. » On espère en effet…

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