Harry Potter a 20 ans: les raisons d’un succès
Vendue à plus de 450 millions d’exemplaires dans 200 pays, la saga Harry Potter passionne toujours, 20 ans après la sortie du premier de ses sept tomes. Un succès d’abord dû à la qualité de l’histoire, selon deux spécialistes interrogés par l’AFP.
Il y a tout juste vingt ans, le 26 juin 1997, l’écrivaine britannique J.K. Rowling publiait le premier tome d’Harry Potter après avoir essuyé une dizaine de refus d’éditeurs. Intitulé Harry Potter à l’école des sorciers, il a été suivi par six autres romans, huit films, une pièce de théâtre et a donné lieu à des parcs à thème aux Etats-Unis et au Japon, à un parcours touristique en Ecosse, une exposition permanente dans les studios Warner Bros à Londres et une ribambelle de déclinaisons marketing.
Si « Harry Potter continue à très bien se vendre et à être très bien lu », c’est avant tout parce que « c’est réussi, c’est une vraie oeuvre », tranche Marie Lallouet, rédactrice en chef de La Revue des livres pour enfants de la Bibliothèque nationale de France.
Un avis partagé par Martin Richardson, professeur en sciences de l’éducation de l’université de Durham (nord de l’Angleterre) où il donne un cours baptisé « Harry Potter et l’époque de l’illusion ». Selon lui, « l’histoire est fondamentalement bonne, la saga incroyablement riche, c’est une superbe aventure, les personnages, un peu unidimensionnels dans le premier tome, sont de plus en plus nuancés » au fil des livres. Et en y plongeant, « les enfants ouvrent les portes du plaisir ».
Retour du merveilleux
Sur le fond, ces livres signent le « retour du merveilleux » dans la littérature jeunesse avec la trilogie du Britannique Philip Pullman, À la croisée des Mondes. Un genre qui ne souffre pas d’obsolescence comme cela peut être le cas pour la science-fiction, note Marie Lallouet. En outre, « les problématiques » du petit sorcier « sont très fondamentales et universelles, elles touchent à la filiation, à son histoire, son destin », ajoute-t-elle.
J.K Rowling, forte d’une riche culture littéraire, a su digérer « tous les grands standards de la littérature jeunesse » dans son oeuvre et a eu le culot de faire des « livres très longs ».
Soulignant qu’en France notamment, pendant la vingtaine d’années précédant la sortie de la saga, une « littérature de l’intime » avait éclipsé « une littérature d’aventure », Marie Lallouet estime que « Harry Potter a réconcilié les deux ». « Il est dans des questionnements très intimes (…) et en même temps, l’auteure avait aussi un scénario extrêmement dense, ambitieux, avec des décors, des effets spéciaux pour prendre des métaphores cinématographiques. L’association des deux a fait quelque chose de très puissant. »
Autre facteur qui a contribué au succès, les modes qui ont suivi la publication de la saga « s’adressaient à un public un peu différent, donc ça a laissé sa place dominante à Harry Potter », dit-elle en citant Twilight, destiné à des filles plus âgées, alors que Harry Potter visait un lectorat mixte et jeune.
Bienfaits notables: « Harry Potter a revalorisé la littérature jeunesse aux yeux des adultes » et a conduit « toute une génération à apprendre l’anglais pour pouvoir le lire dès sa sortie anglo-saxonne », sans attendre la version française, rappelle-t-elle.
« Un peu comme Noël »
Pour Martin Richardson, dans un monde où les jeux vidéo attiraient de plus en plus, notamment les garçons, cette saga « n’aurait pas dû marcher » mais elle a « sans conteste aidé les garçons à lire ». Ces romans font désormais partie de l’ADN du Royaume-Uni et parlent aussi aux adultes qui en les lisant avec leurs enfants y retrouvent « des questions existentielles sur la condition humaine », notamment sur le thème du devoir, note le professeur, en soulignant « le nombre incroyable de niveaux » de lecture possible.
Et puis, « avec ce personnage, on grandissait, ce qui était très nouveau, très fort et très réussi », souligne Marie Lallouet rappelant le déroulé sur une année scolaire de chaque volume et l’attente entre chaque tome. Le tout est porté par « une écriture extrêmement efficace » et une « mécanique éditoriale soigneusement entretenue » pour faire durer cette manne financière, ajoutent les deux spécialistes.
Quant à savoir si les jeunes générations futures seront toujours séduites par les aventures du petit sorcier, Martin Richardson pense que oui. « Dans 20, 30, 40, 60 ans on lira encore Harry Potter. » « C’est un peu comme Noël, ça ne se démodera pas. »
L’auteure
Né le 31 juillet 1965 à Chipping Sodhury (ouest de l’Angleterre), dans une famille modeste, Joanne Kathleen Rowling étudie le français à l’université d’Exeter. Elle part au Portugal enseigner l’anglais et c’est là qu’elle commence à écrire les aventures d’Harry Potter.
Elle se marie en 1992 avec un Portugais, donne naissance à sa fille, Jessica, puis divorce en 1995 et revient s’installer à Edimbourg, en Ecosse, où elle vit d’allocations. Elle termine sa saga et trouve un éditeur, Bloomsbury, en août 1996.
Désignée meilleur écrivain britannique vivant en 2006, elle est à la tête d’une fortune de 650 millions de livres (743 millions d’euros), selon la liste des personnes les plus riches du Royaume-Uni publiée par le Sunday Times en mai 2017.
L’histoire
Né dans l’esprit de l’auteure en 1990, lors d’un voyage en train entre Manchester et Londres, la saga raconte les aventures d’un jeune sorcier nommé Harry Potter et de ses amis Ron Weasley et Hermione Granger à l’école de sorcellerie de Poudlard, dirigée par Albus Dumbledore. L’intrigue principale tourne autour du combat de Harry contre Lord Voldemort, un mage noir à la recherche de l’immortalité qui a assassiné les parents du garçon lorsqu’il était encore bébé.
Sept livres
Sept volumes sont publiés entre 1997 et 2007, qui se déroulent chacun pendant une année scolaire. L’histoire débute à l’été 1991 alors que Harry Potter, pas encore 11 ans, est invité à faire sa rentrée à l’école de sorcellerie de Poudlard.
Huit films
Si elle compte sept livres, huit films ont été tirés de la saga, le dernier volume, Harry Potter et les reliques de la mort, ayant été divisé en deux long-métrages réalisés par David Yates. Les deux premiers films ont été réalisés par Chris Columbus, le troisième par le Mexicain Alfonso Cuaron, le quatrième par Mike Newell et les quatre derniers par David Yates.
Une pièce de théâtre
Dans Harry Potter et l’enfant maudit, une pièce de deux fois 2h30 jouée à Londres depuis juillet 2016, on retrouve le héros adulte et père de trois enfants.
Il se débat avec un passé qui refuse de le laisser en paix. L’héritage familial s’avère aussi lourd pour son plus jeune fils, « l’enfant maudit », Albus Severus Potter.
Les chiffres
Au total, les sept volumes de la saga, traduits en 79 langues dans 200 pays, se sont vendus à plus de 450 millions d’exemplaires dans le monde (dont 28 millions en France) depuis le lancement de la série en 1997, selon l’éditeur britannique Bloomsbury.
Le premier tome a été initialement tiré à 1.000 exemplaires -devenus des trésors pour les collectionneurs- et a valu à J.K. Rowling un contrat de 1.500 livres (1.700 euros).
Selon des données du site www.statisticbrain.com datant de septembre 2016, les films ont rapporté dans le monde 7,2 milliards de dollars (6,5 milliards d’euros), les livres 7,7 milliards de dollars (6,9 mds d’euros) et les jouets dérivés 7,3 milliards de dollars (6,5 mds d’euros).
Les produits dérivés
Les studios Harry Potter à Leavesden, au nord de Londres, permettent de découvrir l’univers des films dans une exposition permanente. Ouvert depuis 2012, le lieu accueille 6.000 visiteurs par jour. Il existe également des parcs à thème créés par les studios Universal à Orlando en Floride, à Hollywood et à Osaka au Japon.
Quant à VisitScotland, l’office du tourisme d’Ecosse, il a mis en place un circuit guidé de quatre jours 100% potterien, d’Edimbourg aux Highlands, en passant par le viaduc de Glenfinnan ou Edimbourg.
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