Critique | Musique

FeverFreak romantique: une pop électronique anticonformiste

4 / 5
© NINA ANDERSSON
4 / 5

Album - Radical Romantics

Artiste - Fever Ray

Genre - AVANT-POP

Label - Rabid/Pias

Critique - L.H.

Laurent Hoebrechts
Laurent Hoebrechts Journaliste musique

Six ans après l’album Plunge, Karin Dreijer réactive Fever Ray. Même apaisée, sa pop électronique reste toujours aussi grinçante et anticonformiste.

Parlons peu, parlons bien: parlons d’amour. Quelle forme prend-il en 2023? Quels sont ses enjeux, ses détours? Est-il sujet au réchauffement climatique? À la hausse de l’inflation? Laisse-t-il encore de la place au romantisme? Et si oui, en quoi celui-ci peut-il bien encore consister?

© National

Vaste sujet auquel s’attaque le nouvel album de Fever Ray, le projet solo de Karin Dreijer. Est-il nécessaire de le préciser: vu l’ascendance de l’artiste, Radical Romantics n’a que peu à voir avec le genre de roucoulade mielleuse que l’on pourrait éventuellement attendre d’un disque tout entier consacré à la question amoureuse. Fever Ray n’est pas Céline Dion. À cet égard, Radical Romantics a beau paraître de prime abord moins “anguleux” que son prédécesseur, Plunge, il évolue, avec le même brio, sur cette ligne ténue et passablement casse-gueule: celle entre le beau et le bizarre.

Karin Dreijer a toujours aimé les trajectoires obliques. D’abord au sein de The Knife, duo constitué avec son frère Olof. Même armée d’un hit mondial (Heartbeats, repris par José González), la fratrie suédoise n’a cessé de manœuvrer en électron libre, planquée la plupart du temps derrière des masques. En solo, sous le nom de Fever Ray, Karin Dreijer a prolongé cette approche déviante de la pop, y insérant ses théories politiques -à gauche, queer et féministe (dans un pays où la majorité parlementaire allie les conservateurs à l’extrême droite…).

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Pour Plunge, en 2017, l’artiste avait ainsi publié une note d’intention, balançant des phrases-slogans comme: “Sex is work, love is work, work is sex, work is love”. Six ans plus tard, Radical Romantics parle encore d’amour. La forme a toutefois un peu évolué. Aux coups d’éclat stridents, Fever Ray a préféré des morceaux à combustion plus lente. Apaisés? First I’d like to say that I’m sorry sont ainsi les premiers mots prononcés sur le disque. “Can you fix it? Can you care?”, demande encore Fever Ray sur What They Call Us. De son côté, le single Carbon Dioxide est ce qui se rapproche le plus du pur moment d’euphorie dance, synthés trance à l’appui.

Flou artistique

Pour autant, la proposition musicale reste toujours aussi magnifiquement tordue. On pourra y trouver des échos de gqom sud- africain (sur New Utensils), ou une forme reggaeton mutant (sur Kandy). Le fait est que la musique de Fever Ray ne ressemble toujours à aucune autre. La voix de Dreijer notamment continue d’être malaxée, troublant les identités de genre: “We don’t come with a manual”, dans Looking for a Ghost, défiant les normes hétérosexuelles.

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Hormis Olof Dreijer, de retour aux côtés de sa sœur, Trent Reznor et Atticus Ross (Nine Inch Nails) et la productrice portugaise Nídia mettent aussi leur grain de sel (sur North pour les premiers, Looking for a Ghost pour la seconde). Frondeur, Radical Romantics est à la fois “lynchien”, narquois (Even It Out, sur lequel Karin Dreijer débarque dans la cour de récré pour terroriser les gamins qui harcèlent son enfant). Monstrueux aussi, et oui, au bout du compte, foncièrement romantique.

Fever Ray sera en concert le 03/04, au Cirque Royal, Bruxelles.

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