Critique | Apple TV

[la série de la semaine] Roar: femmes en cage

3,5 / 5
© National
3,5 / 5

Titre - Roar

Genre - Anthologie

Réalisateur-trice - Une minisérie créée par Liz Flahive et Carly Mensch. Avec Nicole Kidman, Issa Rae, Cynthia Erivo.

Quand et où - Disponible sur Apple TV+.

Nicolas Bogaerts Journaliste

La série anthologique Roar passe en revue les affres de la condition féminine, entre réalisme magique et surréalisme férocement imagé.

Observer Nicole Kidman mâcher des photographies pour en réveiller l’effet proustien. Voir Issa Rae progressivement être effacée de sa propre histoire. Être surpris, avec Cynthia Erivo, de découvrir les morsures sur sa peau. S’étonner de ce que Betty Gilpin vive posée sur une étagère… Liz Flahive et Carly Mensch, les créatrices de la superbement vitaminée et catchy Glow (Netflix), nous proposent ici une minisérie anthologique conduite par huit allégories aussi surprenantes que littérales. Chacun des récits, portés par des actrices de grande renommée (ajoutons aux susnommées Alison Brie, Meera Syal et Fivel Stewart) illustrent les injonctions, les assignations, les choix ou non choix, les places et les situations ubuesques qui président aux destinées des femmes.

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Le style est volontiers jouette, alternant sagacité des situations et commentaires humoristiques ou cruels. À la manière d’autres séries anthologiques (Room 104, Black Mirror), le passage du rire au drame se fait sans transition. De l’intrigue policière au récit initiatique, de la comédie féroce à la critique ouvertement sociale, la morale qui traverse l’ensemble en fil d’Ariane est peu réjouissante, voire parfois carrément glauque. Flirtant volontiers -et de manière pas toujours aussi réussie d’une scène à l’autre- avec des formes caricaturales ou satiriques, la minisérie ne fait pas dans la dentelle et laisse parfois la subtilité au vestiaire. Le titre des épisodes est aussi annonciateur que celui d’un poème d’Emily Dickinson ou de Jacques Prévert (La femme qui disparaissait, La femme qui mangeait ses photographies…). Mais l’essentiel n’est pas là: le propos se devait d’être limpide, troublant d’évidence, car son but est de nous renvoyer immanquablement aux inerties d’une société qui voit ce qui cloche mais pourtant ne fait rien… Ou si peu.

Composées avec ce mélange de fausse candeur et d’intelligence du sous-texte, les huit héroïnes sont fascinantes. Chacune doit faire face à l’invisibilité, l’indifférence, la surdité de leur entourage. On ne les entend ou ne les voit pas du tout. Ou mal. Du coup, les prestations envolées des actrices a tout du rugissement qui déchire le silence pesant pour se faire entendre, ou simplement vivre. Ainsi, lorsque Amelia (Betty Gilpin), une ex-top model devenue, aux sens propre et figuré, un trophée pour son mari sur une étagère, quitte sa condition d’un pas de danse qui la transporte dans le réel, l’émotion est palpable. Tous les épisodes ne rejoignent pas aussi merveilleusement les attentes nées de leurs prémices, mais lorsque la chimie prend de cette manière, Roar est un ravissement.

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