Eksploracja
Le monde se meurt, ou plutôt disparaît peu à peu. Seule éventuelle solution pour éviter le néant et la dématérialisation complète: envoyer une mission aux confins de l’univers pour aller y chercher les matières organiques les plus stables qu’on puisse y trouver et, peut-être, mettre fin à cet étrange processus. Après dix ans de voyage, voilà donc Line et Marlène en quête, sur une planète inconnue et hostile, de l’ Arbea Nauticeum et de l’ Obsidonita Kevlar. Une exploration qui va profondément remettre en cause leur rapport au temps, à l’espace et aux autres, avec parmi eux l’extraterrestre le plus original de ces dernières années, à l’image de ce récit de science-fiction surprenant de bout en bout, et qui révèle une autrice: la Parisienne Julie Michelin, qui publie ici son premier récit d’envergure après des années de fanzinat. Et quelle envergure! Non contente de réussir la fusion entre bande dessinée alternative et BD de genre, son enthousiasmant Eksploracja fourmille de mille bonnes idées narratives -comme cette langue des signes « traduite » en dessin- et aussi, surtout, d’un « female gaze » enfin affranchi des discours lénifiants qui encore trop souvent l’accompagnent. Une version 2.0 de la BD d’autrice, concentrée sur ses personnages, ses aquarelles et son récit de pure fiction, lequel en remontre à beaucoup d’autres en termes d’imaginaire et d’efficacité. Bref, une vraie bonne surprise et une nouvelle bonne pioche des Bruxellois de L’Employé du Moi, décidément à la pointe d’une nouvelle génération d’auteurs complètement décomplexés, qu’il s’agisse encore une fois de BD alternative ou de récits de genre: dans les deux cas, les codes explosent.
De Julie Michelin, éditions L’Employé du Moi, 184 pages.
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