Pourquoi Maniac est l’une des séries les plus passionnantes de la rentrée
Distribution étincelante, récit choral, mondes parallèles et tribulations lynchéennes: la série Maniac est une des grandes réussites de cette rentrée.
Cary Joji Fukunaga (True Detective, Beasts of No Nation, le prochain 007) réussit avec un nouvelliste inconnu, Patrick Somerville, l’adaptation d’une série norvégienne homonyme, fable rétrofuturiste sur la marchandisation du bien-être, entre autres. Owen Milgrim (Jonah Hill) dérive au bord de la schizophrénie, dans un corps plombé par une camisole chimique et une loyauté envers une famille richissime qui lui impose un faux témoignage dans un obscur procès. Annie Landsberg (Emma Stone) erre sans but, désaxée, dans les rues d’une grande métropole. À défaut de pouvoir recoller les morceaux d’une histoire familiale tragique, elle s’anesthésie à coups d’automédication. Lui, persuadé d’obéir à un mystérieux ordre de mission et elle, en manque de son sésame vers l’oubli, acceptent de participer à une étude pharmaceutique et deviennent les sujets d’un test vantant une approche radicale mais délirante de la psychiatrie.
L’expérience, portée par les docteurs Mantleray (Justin Theroux) et Fujita (Sonoya Mizuno), permettrait de soigner chimiquement tous les traumas de l’esprit humain. Assis sur des fauteuils la tête entre deux émetteurs de micro-ondes, les cobayes entrent dans un voyage spatiotemporel figurant les méandres de leur cerveau, une odyssée de l’espèce humaine au coeur des mémoires traumatiques individuelles ou collectives.
Référencée, la minisérie l’est très certainement. La typographie IBM du générique et la présence d’un ordinateur central ramènent à 2001, l’Odyssée de l’espace. Le monde de Maniac ressemble aussi beaucoup à ce que donnerait le nôtre s’il avait bifurqué autrement: pas de téléphone portable mais des télécommunications figées dans une vision futuriste héritée des années 80; les visioconférences ont le grain du VHS, les pictogrammes sont pixelisés; on fume dans les endroits publics; les fauchés peuvent acquérir biens et services à condition de se faire suivre par un homme/une femme-sandwich. Cette réalité façon Brazil revisité par Lynch et Gondry est-elle plus valable que celles visitées par Annie et Owen durant les expériences qui les plongent dans une middle-class de 1990, une heroic fantasy, une histoire d’espionnage…?
Le talent d’Emma Stone, plus lunaire que jamais, et de Jonah Hill, amaigri et regard narcotique, éclate au grand jour dans ce duo qui va, par tous les moyens, tenter de déjouer le schéma imposé par un hilarant Justin Theroux, brimé par une mère omniprésente (Sally Field) et en quête d’extase sexuelle dans un univers parallèle. Le récit de Maniac fonctionne en arborescence et en hyperliens, mais sa belle mécanique est percée de glitches, de courts-circuits, de passages secrets vers les leçons multiples d’une minisérie eschatologique passionnante de bout en bout.
Une minisérie Netflix créée par Patrick Somerville et Cary Joji Fukunaga. Avec Emma Stone, Jonah Hill, Justin Theroux. Disponible sur Netflix. ****
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