La télé de demain sera-t-elle celle « dont vous êtes le héros »?

Buddy Thunderstruck © Netflix
FocusVif.be Rédaction en ligne

La prochaine frontière pour la télévision: choisir son aventure, à la manière des « livres dont vous êtes le héros » répandus dans les années 80. Netflix a déjà produit deux épisodes spéciaux explorant les possibilités.

C’est un instinct naturel pour les fans de cinéma: vouloir hurler au personnage qu’il attrape la mauvaise valise, qu’il a oublié les piles de sa lampe de poche ou que le méchant n’est pas mort comme il le croit. Tous ces cheveux arrachés et ongles rongés pourraient n’être bientôt qu’un lointain souvenir, grâce à une nouvelle génération de contenu interactif qui donne au spectateur une part de contrôle sur la narration.

Le pionnier du streaming Netflix mène la charge. Des épisodes spéciaux de deux séries animées, Les aventures du Chat Potté (le personnage de Shrek) et celle en stop-motion Buddy Thunderstruck, offrent ainsi la possibilité de « choisir son aventure », comme dans certains romans des années 80, mais cette fois dans des contenus de télévision sur internet. Les spectateurs se voient interrogés à plusieurs étapes de l’histoire sur ce que le personnage devrait faire juste après, et peuvent naviguer entre plusieurs fins possibles avec leur télécommande ou par boutons tactiles.

Une autre série, Stretch Armstrong: The Breakout, adaptation d’un personnage de films d’actions américains des années 70, doit aussi arriver sur Netflix l’an prochain.

« Faire abdiquer Elizabeth II »

Les consommateurs ont eu pléthore de choix depuis les années 80 dans le domaine des « livres dont vous êtes le héros », où l’on peut choisir sa propre aventure. Et aujourd’hui les jeux vidéos, où le joueur sélectionne en permanence des options, ont souvent l’apparence léchée -et le budget faramineux- des films les plus somptueux.

Wayne’s World (1992), Sliding Doors (Pile et Face) (1998) et 28 Days Later (28 jours plus tard) (2002) ont déjà expérimenté l’idée de plusieurs fins possibles mais n’avaient pas donné au spectateur le pouvoir d’influencer la narration en temps réel.

Eric Towner, cofondateur du studio de stop-motion Stoopid Buddy Stoodios, et l’un des réalisateurs de Buddy Thunderstruck, estime que les programmes pour enfants étaient le point de départ naturel pour expérimenter la narration interactive, car les enfants ont déjà l’habitude de taper, toucher, balayer les écrans. Ils ont « tendance à regarder les choses encore et encore. Le fait qu’ils puissent les regarder à nouveau et que ce soit différent à chaque fois (…), c’est unique », estime Eric Towner, interrogé par l’AFP.

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Pour l’instant, Netflix ne parle que d’expérimentation, mais le format pourrait être élargi au-delà des programmes pour la jeunesse si assez de ses 100 millions d’abonnés réagissent positivement. L’objectif ultime serait de produire un épisode de la saga politique à succès House of Cards où les spectateurs pourraient décider que le président Frank Underwood va envoyer une bombe nucléaire sur la Corée du nord, ou de The Crown, où ils pourraient faire abdiquer la reine d’Angleterre Elizabeth II.

« C’est fou ce qu’on pourrait faire »

« Quand on commence à y réfléchir, à creuser et à imaginer des choses plus complexes que ce qu’on a fait là, c’est fou tout ce qu’on pourrait faire », souligne M. Towner.

Tony Gunnarsson, analyste de la société de consulting en télécoms Ovum, ne s’attend toutefois pas à ce que ces expérimentations interactives métamorphosent la télévision de sitôt. « Je pense que ce type de programmes fera plutôt l’objet d’épisodes spéciaux uniques. Netflix ne va certainement pas avoir des narrations à variantes pour de multiples séries à partir de maintenant », a-t-il affirmé à l’AFP.

Le premier film réellement interactif, Late Shift (2016), produit par la start-up suisse CtrlMovie, a été un succès dans les festivals de cinéma à travers le monde. Les spectateurs votent sur ce que doivent faire les protagonistes, avec au final sept différentes fins possibles, et ce en utilisant une application pour smartphones, le tout alors que le film continue à jouer, sans arrêt pendant 70 à 90 minutes. Dans un registre similaire, on se souvient également du clip de Words Hurt des Français de Naive New Beaters, qui offrait pas moins de 47 scénarios différents.

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« Ce type de contenu n’a pas été possible sur une large échelle, jusqu’à présent », commente Glenn Hower, analyste médias chez le cabinet Parks Associates, interrogé par l’AFP. « Cela pourrait être fait sur DVD ou disque Blu-ray, mais le ressenti est généralement lent et interrompu », ajoute-t-il.

Il imagine toutefois un possible mariage heureux des films interactifs avec la technologie en plein boom de la réalité virtuelle: « Consommer des contenus formatés pour la réalité virtuelle est déjà très personnel -on est isolé du reste du monde par un casque- et permettre une narration libre ou semi-dirigée donnerait aux spectateurs la possibilité de la personnaliser encore plus », conclut-il.

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