Critique | Arte.tv

[la série de la semaine] Un mètre vingt, sur Arte.tv et YouTube: à hauteur de fauteuil…

Pour la première fois, l’héroïne d’une série est en fauteuil roulant. Venue d’Argentine, Un mètre vingt fait fi des tabous et bouscule le regard sur le handicap.

Force est de l’admettre, les créateurs des séries contemporaines ont décidément compris qu’aucune minorité ne pouvait encore être considérée comme invisible -et aucun sujet jugé tabou. Nouvel exemple avec cette étonnante série tout droit venue d’Argentine: Juana, 17 ans, vient de changer de lycée. Pas toujours facile de s’intégrer, surtout quand on se déplace en fauteuil roulant… Qu’a cela ne tienne, Juana veut la même vie que les autres, et rêve à sa première relation sexuelle. Elle se lie rapidement d’amitié avec quelques activistes en herbe, en lutte pour une éducation sexuelle digne de ce nom dans leur établissement. Juana va petit à petit devenir une des meneuses du mouvement. Inscrite sur une appli de rencontres, elle tente, en parallèle, de trouver des réponses à ses questionnements intimes.

Une histoire de corps

Comme le dit Rosario Perazolo Masjoan, la co-autrice et co-réalisatrice de la série, elle-même handicapée, « Un mètre vingt propose de repenser à la fois les corps que nous avons l’habitude de voir sur les écrans, et ceux qui racontent les histoires portant sur ces corps. » De fait, le corps de Juana sera montré sous toutes ses coutures. Une révolution! « La personne est, en général, uniquement filmée dans son fauteuil… Ça finit par nous assimiler à un objet! », pestait-elle récemment dans une interview pour Télérama. Aussi, ici, pas de romantisme superflu, la vision est frontale, à hauteur de fauteuil (un mètre vingt, quoi): de son pénible quotidien, on saura tout -du porter hors du lit au réveil, en passant par l’aide nécessaire pour se nourrir, voyager, ou aller aux toilettes, jusqu’à l’embarras évident précédant l’acte sexuel (et les « non, pas comme ça » ou autres « tu peux déplacer ma jambe? »).

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Malgré ces multiples obstacles -ajoutés à ceux, « normaux », d’une adolescente lambda incluant les disputes régulières avec les parents (ici une mère qui élève seule Juana et sa soeur)-, notre héroïne est forte, et lorsqu’un garçon rencontré via l’application lui demande comment elle s’est retrouvée dans ce fauteuil, elle répond du tac au tac: « J’ai été percutée par une voiture en venant, tu devrais te sentir coupable »

Autre petite révolution, tout ce que parvient à traiter la série en seulement six épisodes d’une quinzaine de minutes à peine: outre le handicap et la sexualité en général, les autrices accomplissent l’exploit d’également traiter l’amitié, le consentement, le pouvoir néfaste des réseaux sociaux, l’engagement politique, la quête identitaire… Décidément novatrice et réjouissante, Un mètre vingt se décline aussi en un court film de 35 minutes en réalité virtuelle (équipement nécessaire). On y suit ces aventures du point de vue de Juana. Vous avez dit moderne?

Un mètre vingt

Drame. Une série créée par Ezequiel Lenardón, María Belén Poncio, Rosario Perazolo Masjoan. Avec Marisol Agostina Irigoyen, Florencia Licera, Marcio Ramses. Disponible sur Arte.tv et YouTube. ****

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