Critique

[à la télé ce soir] Punk! Il était une fois Gilles Bertin: coeur de braqueur

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Julien Broquet
Julien Broquet Journaliste musique et télé

C’est l’histoire hallucinante d’un rockeur devenu braqueur. Celle d’un punk qui s’est rendu après 28 ans de cavale, a raconté sa vie dans un livre et est mort du sida quelques semaines seulement après avoir retrouvé son identité.

Fils de communistes à l’éducation rigide qui part en vrille au collège, Gilles Bertin crache ses pensées dans le punk français des années 80. Son groupe s’appelle Camera Silens. Une référence aux cellules d’isolement utilisées pour l’incarcération des membres de la Fraction armée rouge. Les paroles sentent la crête et le désespoir des banlieues… « T’es là à te branler et le temps passe en vain. À t’imbiber de noirs desseins. T’es là à poireauter dans ces journées sans fin. À digérer ton destin… » En 1982, à Bordeaux, le trio remporte le tremplin Rockotone ex aequo avec Noirs Désirs (encore au pluriel). La bande à Cantat décline la récompense qui consiste en une session enregistrement. Camera Silens met en boîte une maquette et passe même aux Enfants du rock, où il représente la mouvance punk oi. C’est une bande de jeunes nihilistes qui ne veut rien devoir à personne, vit dans la débrouille, bouffe et s’habille comme elle peut. Il y a aussi la came, cette héroïne qui tourne et qui conditionne tout le reste. Gilles, le chanteur, tombe très vite dans la délinquance et les petits braquages. À l’époque, pour gagner sa vie, il s’attaque à des bijouteries et des banques. « Les banques, les postes, les lotos, précise l’un de ses comparses. Là où il y a de l’argent mais où c’est pas un pauvre ouvrier qui se lève le matin à se crever le cul. »

« Je voulais vivre à fond et la musique ne me donnait plus ce dont j’avais envie, explique Bertin. C’est un peu comme grimper sur scène un braquage. La montée d’adrénaline. Cette sensation de bien-être. C’est inexplicable. » Le 27 avril 1988, avec une dizaine de complices, des fausses 4L de la gendarmerie et des uniformes de fortune (l’opération a nécessité deux ans de préparation), il cambriole le dépôt toulousain de la Brink’s. Aucun coup de feu n’est tiré. Le butin s’élève à 1,79 million d’euros… Le documentaire d’Eugénie Grandval retrace avec le principal intéressé la vie du rockeur braqueur. La cavale et l’anonymat forcé. Son passage à Barcelone et son magasin de disques au Portugal… Le sida aussi, qui l’a rattrapé, et sa reddition pour sortir de la clandestinité après la naissance de son deuxième fils. L’essentiel du butin n’a jamais été retrouvé…

Documentaire d’Eugénie Grandval. ****

Mardi 12/01, 00h05, France 2.

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