Critique

[à la télé ce soir] Les Âmes mortes

© LES ACACIAS / ADOK FILMS / ARTE FRANCE
Julien Broquet
Julien Broquet Journaliste musique et télé

Tourné sur plus de dix ans, un important, faramineux et vibrant travail de mémoire à l’heure où les derniers témoins de la campagne des Cent Fleurs disparaissent…

En 1957, le gouvernement chinois lance une chasse aux droitiers afin d’écarter toute personne suspectée d’opposition au pouvoir en place. Entre 550.000 et 1.300.000 personnes sont désignées. Beaucoup sont tombées dans le piège de la campagne des Cent Fleurs, présentée comme un grand appel lancé à la population pour faire remonter les critiques aux dirigeants du parti mais dans les faits un outil diabolique pour museler toute opposition et couper les langues trop bien pendues. Intellectuels, enseignants, techniciens, artistes… Beaucoup sont envoyés en camps de rééducation par le travail. Le documentaire fleuve de Wang Bing (huit heures et quart pour trois volets) donne la parole aux rescapés et se penche tout particulièrement sur la ferme de Jiabiangou, où près de 2.700 prisonniers politiques sur 3.200 détenus ont trouvé la mort entre 1957 et 1961. On voit la profonde tristesse et la douleur apparaître sur les visages tandis que les vieillards plongent dans leurs souvenirs pour raconter l’inracontable. La crasse, la maladie et surtout la faim. « À Taizisi, les gens s’étaient mis à manger de la chair humaine. Les gens mangeaient les morts. Quand ils mouraient, on allait les enterrer et le soir, certains revenaient découper la chair… » Tourné sur plus de dix ans, un important, faramineux et vibrant travail de mémoire à l’heure où les derniers témoins disparaissent…

Documentaire de Wang Bing. ****

Mardi 23/11, 01h10, Arte.

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