Critique

[à la télé ce soir] Emmanuelle: la plus grande caresse du cinéma français

© EMMANUELLE TINACRA FILMS
Julien Broquet
Julien Broquet Journaliste musique et télé

Sa bande annonce promettait « la plus grande caresse du cinéma français« . En juin 1974, Emmanuelle batifole sur grand écran et émoustille. Même si les rapports sexuels sont plus suggérés que réellement montrés, sa sortie retentit comme un coup de tonnerre dans le paysage des fantasmes planétaires et fait l’objet d’un scandale retentissant dans un monde corseté par la morale et la religion.

Emmanuelle, c’est le film qui a propulsé Sylvia Kristel au rang d’icône et inauguré l’âge d’or de l’érotisme soft à l’heure de la révolution sexuelle. Son histoire, c’est celle d’un coup du sort déjà. La mannequin néerlandaise de 20 ans postule au casting d’une publicité pour une machine à laver, mais elle se trompe de porte et rencontre par hasard Just Jaeckin, pressenti pour réaliser un film coquin surfant sur le succès du Dernier Tango à Paris. Yves Rousset-Rouard veut un film interdit aux moins de 18 ans (ensuite il produira Les Bronzés) tandis que Jaeckin a une vision très esthétique de la beauté des femmes. Le producteur est roublard, le réalisateur, prude, et l’actrice, élevée dans un pensionnat religieux plutôt sage. « Je suis assez pudique« , avoue-t-elle. Mais avant les scènes de nu, « je prends quelques bières et la gêne s’en va« .

Le documentaire de Clélia Cohen, qui s’est déjà penchée sur les cas de Travolta, Stallone, Birkin ou encore Indiana Jones, est à la fois un making of et une mise en contexte. Emmanuelle est l’adaptation d’un roman attribué à Emmanuelle Arsan, femme de diplomate à Bangkok, racontant son initiation sexuelle auprès d’un mari permissif et libertin. Un ouvrage sorti en 1959 qui a circulé sous le manteau. « C’est un joli film. Avec des qualités, des défauts. Mais c’est un phénomène de société qui nous dépasse complètement, explique Jaeckin. Le succès, c’est celui d’être tombé pile au bon moment. La libération sexuelle, la pilule… »

Féminisme, planning familial, luttes pour le droit à l’avortement… La politisation de ces questions est à l’ordre du jour. Monokini, naturisme et amour libre. Durant les années 70, les femmes font ce qu’elles veulent de leur corps. Tandis que l’équipe (caméraman, costumière, actrices) partage des anecdotes de tournage et se souvient de son voyage en Thaïlande (officiellement pour tourner un documentaire), Ovidie, l’auteur Marc Godin ou encore l’historienne Christine Bard éclairent ce film culte qui aurait attiré plus de 350 millions de téléspectateurs dans le monde depuis sa sortie.

Documentaire de Clélia Cohen. ****

Vendredi 25/06, 22h30, Arte.

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