Critique

[à la télé ce soir] Basquiat, un adolescent à New York

© ALEXIS ADLER
Julien Broquet
Julien Broquet Journaliste musique et télé

Ce documentaire dépasse le cadre du simple portrait. Fascinant et arty…

Qu’ils parlent de politique, de cinéma, de littérature, de musique, les documentaires biographiques sont souvent d’un classicisme voire d’une banalité peu communs. Rarement d’ailleurs à la hauteur (la cheville serait déjà parfois pas mal) de ceux qu’ils nous racontent. Basquiat, un adolescent à New York fait exception à la règle et dépasse le cadre du simple portrait. L’artiste est mort jeune, en 1988, à seulement 27 ans. Mais comme son nom l’indique, le documentaire de Sara Driver (la compagne de Jim, qui y va de quelques commentaires) ne s’intéresse qu’au début de sa carrière. Entre ses premières signatures sur les murs de Manhattan et ses premiers succès commerciaux dans les galeries.

Tout commence avec des images incroyables d’un New York disparu. Un New York proche de la faillite où règnent la pauvreté, la délinquance et le danger. Le nihilisme d’une jeunesse, la génération No Future, en quête d’agitation. « Il y avait peu d’options quand on était un artiste plongé dans cette ville en décomposition« , explique Lee Quiñones, le Léonard de Vinci de la peinture à la bombe dans le métro. Mystérieux, Jean-Michel Basquiat s’exprime alors avec Al Diaz sous le nom de SAMO (pour Same Old Shit) sur les briques de rues délabrées. Il n’y fait pas de jolis dessins: il invite à réfléchir avec des pensées et de courts poèmes… « Les messages de SAMO s’en prenaient souvent à ceux qui jouaient à faire de l’art avec l’argent de leurs parents, qui se voulaient bohèmes avec les sous de papa et maman. Pendant que nous on galérait vraiment pour s’en sortir« , explique le pionnier du hip-hop Fab 5 Freddy.

Fabriqué avec des archives saisissantes, les propos de témoins privilégiés qui l’ont fréquenté (amies, amantes, complices…) et nourri par une impeccable B.O. (Delta 5, Suicide, Pylon, Liquid Liquid…), Un adolescent à New York se promène au Club 57, où on prenait des champis, et au Mudd Club, où on consommait de l’héroïne, devant le CBGB et dans les vernissages. Il raconte une ville aussi dangereuse et violente que bouillonnante et l’entrée des cultures afro-américaines et urbaines dans le monde de l’art. Il s’intéresse à l’homme à femmes et au grand amateur de musiques industrielles (Test Dept, Einstürzende Neubauten…) qu’il trimballait sur son ghettoblaster alors que tout le monde écoutait du Grandmaster Flash. « Il n’était pas avec son pinceau et son chevalet. Il était plutôt du genre à assembler des trucs à la colle forte. Jean faisait de l’art comme il fumait un joint. Comme ça, en discutant. Ça faisait partie de l’ambiance chez lui. » Basquiat ne parle pas dans ce documentaire. Il est raconté par les autres. Fascinant et arty…

Documentaire de Sara Driver. ****(*)

Jeudi 20/01, 21h10, France 4.

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