Sous le nom de Melville

© La Deux

La moindre des choses, quand on s’attaque à un monstre du cadrage, à un obsédé de l’image, est de soigner… la forme. Olivier Bohler joue de cette ambition formelle avec panache, dans un premier temps, avant d’être rattrapé par la distance, comme c’est souvent le cas dans ce type de films. Car les fioritures, les petits dessins, les cartons et autre générique en clin d’oeil, il faut les tenir sur la longueur quand on a tant de choses à dire. Et Jean-Pierre Melville n’étant pas exactement le moins complexe des cinéastes français, des choses à dire, il y en a par tonneaux.

Documentaire d’OLIVIER BOHLER.

Ce mardi 18 mai à 22.50 sur LA DEUX

L’auteur de ce fort intéressant documentaire a choisi de compartimenter la vie de Melville en thématiques. Enfance, crime, guerre, politique, amitié… En filigranes, la voix fluide et le ton posé du metteur en scène né Jean-Pierre Grumbach, Alsacien juif de bourgeoisie moyenne que le second conflit mondial va transformer en Jean-Pierre Cartier, puis en Jean-Pierre Melville (référence à Herman l’écrivain), compagnon de De Gaulle.

S’il choquera plus tard en affirmant que la guerre fut l’un des meilleurs souvenirs de sa vie, l’ambition, voire l’obsession, de devenir cinéaste l’accompagnera au combat. Héros de guerre, cet « anarchiste en essuie-glace, un coup à gauche, un coup à droite » mettra ses rêves à exécution dès que la boucherie de 39-45 l’aura libéré de ses obligations.

INFLUENCE SUR L’ASIE

S’en suit une carrière où cet amoureux du ciné américain d’avant-guerre, largement influencé par les films de studio, va devenir à son tour une référence pour tout un pan du 7e Art… asiatique. Pas étonnant de voir un Johnnie To, auteur du récent Vengeance (avec Johnny Hallyday), parler de l’esprit de Melville dans le cinéma de Hong-Kong. Parallèlement aux chefs-d’£uvre qu’il fomente, de l’essentielle Armée des Ombres au fabuleux Cercle rouge, Jean-Pierre Melville se façonne un personnage reconnaissable entre tous, lunettes noires, chapeau à l’américaine et silhouette à la Hitchcock.

Les intervenants qu’Olivier Bohler a convoqués pour ouvrir la boîte à souvenirs s’appellent Volker Schlöndorff, Bertrand Tavernier ou Philippe Labro. Pas que des nains pour un documentaire qui a le grand mérite de ne pas se fixer exclusivement à la biographie de Melville pour lancer le téléspectateur sur de réelles pistes cinématographiques, celles où l’on parle précision du champ-contre-champ ou tension dans le jeu des acteurs. L’amoureux de cinéma y puisera certainement une grosse heure de plaisir. l

Guy Verstraeten

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