Critique

The Beaver

DRAME | Une marionnette tient un rôle capital dans Ce conte étrange qu’est The Beaver, le film de Jodie Foster où Mel Gibson trouve son rôle le plus inattendu.

« Ceci est une image de Walter Black… » La voix off, qui introduit le récit et reviendra en commenter la fin, évoque irrésistiblement celles qu’affectionnait Rod Serling, le créateur de la fameuse série télévisée des années 60 The Twilight Zone. Et c’est très probablement du côté de ce sommet d’étrange et de fantastique au quotidien que Kyle Killen, le scénariste de The Beaver, a puisé plus ou moins consciemment l’inspiration de cette histoire où un homme gravement déprimé décide de ne plus communiquer que par une… marionnette, ustensile schizophrène qui prendra progressivement l’ascendant sur son manipulateur devenant manipulé.

Jodie Foster a choisi, pour son 3e long métrage, ce sujet entrant bien dans son goût des histoires intimes, familiales, pimentées d’un peu (voire beaucoup) d’étrangeté dans les rapports, et de décalage dans l’angle du regard. Little Man Tate, en 1991, puis -sur un mode mineur- Home For The Holidays, en 1996, avaient démontré la validité touchante d’une approche qui se développe plus singulièrement encore avec The Beaver. L’actrice et réalisatrice jouant elle-même, sobrement, l’épouse du personnage central du film, confié à un Mel Gibson dont Foster a sans nul doute perçu le grain de folie, signalé çà et là dans sa filmographie par de mémorables scènes de pétage de plombs…

Therapy!

Walter Black va donc mal, très mal, même. Accablé par une dépression profonde, il ne néglige pas seulement l’entreprise familiale de jouets, mais aussi sa femme et ses enfants. Pour le bien de ces derniers, Meredith finira par chasser du foyer cette ombre humaine dormant la plupart du temps et broyant du noir quand il est réveillé. Walter ne s’accrochera pas plus aux siens qu’à ses affaires. Mais en mettant à la poubelle de vieilles possessions obsolètes, il récupère in extremis une marionnette à main figurant un castor. Un peu plus tard, au terme d’une dérive éthylique, c’est à travers ce jouet, et avec un improbable accent britannique, qu’il se remettra à communiquer avec le monde extérieur!

Tant Meredith que les employés de sa société auront quelque mal à accepter ce qui prend initialement les allures d’une lubie, voire d’un symptôme alarmant de maladie mentale. Seule la fille encore très jeune de Walter se réjouit de dialoguer avec la bestiole. Son grand fils, lui, y trouvant un motif supplémentaire de rejet… Pourtant, progressivement, les effets positifs de la présence du castor se feront sentir dans l’entreprise, puis entre mari et femme. Mais si la thérapie entreprise par Walter se révèle efficace, un phénomène inquiétant, menant aux limites du fantastique, en marquera les limites de cruelle façon…

Si l’humour est bien présent dans The Beaver, l’angoisse existentielle le hante de prenante façon. Jodie Foster fait du film une interrogation personnelle sur le mal-être intime, les fragilités mais aussi les forces du couple et du rapport paternel. Un spectacle bizarre, inégal, risqué, un peu monstrueux et pourtant attachant dans ses meilleurs moments. Le hiatus entre une idée de base aux limites du grotesque et un filmage très réaliste ouvrant parfois, malheureusement, des espaces béants dans le tissu narratif et émotionnel. Mel Gibson, dont les délires intégristes et antisémites avaient fait oublier qu’il peut être un acteur fascinant, y trouve en tout état de cause un de ses rôles marquants.

Louis Danvers

The Beaver, drame de Jodie Foster. Avec Mel Gibson, Jodie Foster, Cherry Jones. 1 h 31. SORTIE: 25/05. **
www.thebeaver-movie.com

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