Patti Smith: power to the people

ROCK | Via ses singles, la compilation ‘Outside Society’ revient sur les 10 albums studios de Patti Smith. Une vision romantisée du rock comme facteur régénérateur.

Dans son autobiographie Just Kids, parue en 2010, Smith raconte ses premières années à New York, où elle débarque en 1967 de l’anonymat du New Jersey. D’emblée, elle pose l’axiome de ce qui préside à toute sa carrière: le rock est d’abord un aimant à fantasmes et quiconque s’en approche suffisamment près, avec un poids gravitationnel conséquent, y sera immanquablement aspiré. Croyance en une forme de culte suprême qui, dans les années 50-60 dont Patti est le pur produit, incarne le double ludique et carnassier du rêve américain, éviscéré par ses fissures sociales et idéologiques (JFK, Vietnam, drogues dures). Pour arriver à ses fins, Smith concocte d’abord des poèmes traversés par les fantômes de Rimbaud et de Dylan, avant de rencontrer Lenny Kaye, guitariste qui met en son ses premiers délires verbaux, le duo s’incarnant ensuite sous forme de groupe rock complet, contemporain des Ramones ou de Blondie.

Cette compilation n’est pas la première, le double CD Land paru en 2002 étant plus exhaustif. Celle-ci rate donc les premiers gémissements/vagissements smithiens, comme la reprise de Hey Joe et sa face B, Pissing Factory, enregistrés en 1974. Chronologique, elle s’ouvre sur 2 titres du premier album, le séminal Horses, dont Gloria, relecture perso du vieux standard de Van Morrison, qui démarre par les mots « Jesus died for somebody’s sins but not mine ». Déjà une idée précise de la rédemption.

Because The Night…

Le rock de Patti au mitan des seventies est en équilibre entre le masculin-féminin, incarné dans l’androgynie étudiée de la pochette de Horses. Et aussi entre la décharge primale qui fait même vieillir les Stones (ceux de 1975…) et des mélodies venant lécher leurs blessures aux hit-parades. Une chanson empruntée à Bruce Springsteen devient en 1978 le plus gros tube de Patti (Because The Night), d’autres titres ultérieurs concrétisant une écriture volontiers pop: Frederick (1979) , dédié à son futur mari Fred « Sonic » Smith, ex-guitariste des fabuleux MC5, mort précocement en 1994 ou encore People Have The Power (1988) , récemment repris par les contestataires du Caire ou de Madrid.

Même si on pointe quelques carences compilatoires, telle l’absence de Ask The Angels de Radio Ethiopia, aussi catchy que populaire parmi les fans, il est clair que la flamme Smith anime toujours sa sacristie rock. Exemples récents: en 2007, sur Twelve, album de covers, la reprise appalachienne, banjo compris (…) du millésime Nirvana (Smells Like Teen Spirit). La plage originale de Trampin’ (2004) menée avec sa fille Jesse, tendant même à dire que pour Miss Smith, la chose rock, déifiée, se transmet aussi de génération en génération…

Philippe Cornet

Patti Smith, Outside Society, distribué par Sony Music. ****

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