La carte Stromae

Stromae © DR

Fort de son carton européen avec Alors on danse, Stromae se pose comme le chaînon manquant entre Benny B et Kanye West. Improbable? Pas si sûr…

Un bar-club branché de la verte banlieue bruxelloise. C’est là que la maison de disques Universal a décidé d’organiser sa petite sauterie estivale. Au programme, barbec’ sous le soleil et show-case en plein air avec les « nouveaux talents maison ».

Stromae s’est calé dans un coin pour discuter le coup. Il a de quoi raconter, entre les premières vidéos faites maison balancées sur le Net, et le carton historique d’Alors on danse. Un tube qui tourne depuis l’automne en Belgique et qui a pris entre-temps une envergure continentale (Allemagne, France…). Produit avec trois fois rien, il bénéficie aujourd’hui de l’appui d’une major aux petits soins.

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Au cours de la conversation, le patron d’Universal Belgique amène d’ailleurs à table une bouteille de champagne, le cadeau d’une grosse chaîne de disquaires. Le succès, la gloire, l’alcool. Bientôt, les filles et la drogue? « Promis, je m’y mets dès demain », rigole l’intéressé.

Stromae est né Paul Van Haver, il y a 25 ans. Une mère belge, un père rwandais (« Je ne l’ai jamais connu, j’ai cru comprendre qu’il était mort pendant le génocide… Mais je ne tiens pas spécialement à mettre ça en avant. Cela n’a jamais été non plus une réelle souffrance »). Avec ses quatre frères et soeur, il grandit à Bruxelles, du côté de Bockstael.

New beat

La musique? Il y a d’abord des cours de batterie dès 12 ans, puis plus tard le rap. En 2007, Stromae (maestro, en verlan) s’offre ainsi un premier maxi, avec les sous gagnés en bossant au Quick. Mieux: il est bientôt signé en édition chez Kilomaitre (Because). Ce qui lui permet par exemple de fournir une série de beats à Kery James, l’une des stars du rap français. Toujours intéressant sur un CV… Au fil du temps, le bonhomme a cependant tendance à chercher le décalage. Au training des débuts fait bientôt place le petit pull col roulé et casquette, genre Brigades du tigre plutôt que Yankees de New York…

Au bout d’un moment, Stromae largue carrément les amarres. « J’allais pas pouvoir assumer un album rap classique. C’était pour se flinguer. Donc j’ai commencé à creuser un peu dans l’électro. Mon petit frère notamment m’a fait redécouvrir toute une culture dance européenne. Je me suis rendu compte par exemple qu’on a ici en Belgique un background de malade: l’acid house, la new beat, la techno… » Au même moment, une star du rap US comme Kanye West sort un album plus électro. Kid Cudi plonge carrément dedans, que ce soit avec les Crookers ou David Guetta (qui produit également les Black Eyed Peas). L’Anglais Dizzee Rascal fait de même avec Calvin Harris…

Pour autant, les critiques ne manquent pas de tomber sur Stromae, accusé de haute trahison à la cause hip hop. Lui est déjà ailleurs, balance des petites vidéos virales (ses fameuses « leçons », au cours desquelles il explique comment fabriquer un morceau, tout seul, dans sa chambre). « J’étais parti dans une optique de buzz. En restant créatif, mais en intégrant sans honte un côté marketing dans mon boulot. » Et cela marche. Après, il y a le coup de chance: en stage à NRJ dans le cadre de ses études à l’Inraci, il est repéré. Bientôt, la station radio en fait son poulain, poussant à fond Alors on danse. La suite est connue…

Aujourd’hui, c’est l’album qui déboule. Il s’intitule Cheese, pour le sourire forcé sur les photos. Peut-être aussi pour le côté… cheesy de certains claviers et autres gimmick dance, les leçons de Stromae se muant parfois en recettes. « En même temps cela reste un premier album. On verra bien par la suite comment évoluer. Mais cela n’aurait pas de sens de faire toujours la même chose. »

L’ambition est claire: toucher les « 7 à 77 ans », avec en tête une référence comme… Pixar. « Etre branché, c’est facile. Etre populaire aussi. Par contre, c’est plus compliqué d’allier les deux, comme le fait Pixar, qui crée des dessins animés qui touchent à la fois les gamins et les adultes. »

Aussi calibrées soient-elles, les chansons de Stromae ne sont cependant pas si innocentes que ça. C’est que derrière les sons trance clinquants, la sinistrose règne. Alors on danse avait donné le ton. Te Quiero, le nouveau single, persévère: on s’attend à une roucoulade de latin lover, et on a droit à une attaque en règle des illusions du couple. Le procédé (en gros, un texte déprimé sur une mélodie enjouée) est classique. Ici, il est cependant poussé à des sommets de misanthropie. « C’est juste humain. Il n’y a pas de morale. Le seul message, c’est peut-être que, problème ou pas, tu souris et tu vis. C’est un peu l’état d’esprit belge, non? On a des problèmes, c’est la merde, mais la vie continue. On mange, on boit, on danse. On n’a pas de gouvernement, mais tout continue à tourner »…

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Stromae, Cheese , chez Universal.
Les leçons de Stromae.

Laurent Hoebrechts

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